En réponse au message :
Pour l’amour de l’Eglise
@Lancelot
Ayant été victime d’une dérive sectaire au sein d’une communauté monastique qui n’était pas Bethléem, je peux vous dire que ma famille n’a jamais été au courant de ce qui se passait à l’intérieur de cette communauté. La supérieure a toujours été très souriante, etc. D’ailleurs, je ne leur ai jamais raconté le fin fond de l’histoire, même vingt ans plus tard. A quoi bon les inquiéter avec ça ?
Beaucoup de personnes qui fréquentaient ce couvent ne se doutaient absolument de rien. Entre la façade vis à vis de l’extérieur et les dysfonctionnements à l’intérieur, il y avait un monde. Nous avions aussi de très beaux offices, de belles icônes, etc. Et il y avait des groupes au parloir avides d’entendre des témoignages édifiants sur notre vie telle qu’elle aurait dû être … mais qu’elle n’était pas. Et nous nous mentions à nous-mêmes avec une conviction naïve effarante. Il m’a fallu plusieurs mois après l’intervention des autorités ecclésiastiques pour réaliser sous quelle emprise j’avais vécu, c’est pour vous dire !
Le noviciat aussi était rempli. Rempli de personnes qui n’avaient rien à faire là et qui n’ont pas persévéré au sein de l’ordre quand la communauté a été dissoute. Désolée d’être aussi crue, mais en matière de vie religieuse « faire du chiffre » aujourd’hui, ce n’est pas normal. Pourquoi y a-t-il si peu de moniales chartreuses et autant de soeurs de Bethléem alors qu’elles sont censées vivre le même charisme ? Autrefois on disait que les soeurs de Bethléem vivaient la vie des chartreux sans les austérités. Aujourd’hui, ce qui pose question, c’est notamment ces austérités.
Tous les docteurs mystiques ont dénoncé l’ascèse pour elle-même. L’ascèse n’est jamais un but en soi. D’ailleurs, ce que les témoignages dénoncent, ce ne sont pas les exercices ascétiques, mais les excès. La discrétion, c’est à dire la mesure, est une règle intemporelle en matière d’ascèse. Quand les privations en viennent à gêner la prière, à l’empêcher, elles n’ont plus raison d’être.
Laisser faire l’Eglise, dites-vous ? Mais l’Eglise ne se réduit pas à ses responsables ecclésiastiques, l’Eglise c’est chacun de ses membres. Il est normal que de simples fidèles s’expriment sur des dysfonctionnement au sein de leur Eglise. Quant aux responsables ecclésiastiques, ils restent des êtres humains avec leurs grandeurs et leurs faiblesses. Certains auront le courage de faire ce qu’il faut, et d’autres préféreront minimiser, crier aux « racontars ».
Seulement quand des témoignages deviennent à ce point nombreux et concordants, quand, dans un justificatif, un institut admet contrevenir au code de droit canonique (durée du noviciat, sollicitation de confidences de la part des supérieurs) on est en droit de s’inquiéter sérieusement.