FAQ

Vendredi 21 décembre 2012 — Dernier ajout samedi 24 février 2018

Foire aux questions

« Les maux qui, au fil du temps, frappent les institutions ecclésiastiques ont des racines dans l’autoréférentialité, dans une sorte de narcissisme théologique.(…) L’Église, quand elle est autoréférentielle, sans s’en rendre compte, croit posséder une lumière qui lui est propre ; elle cesse d’être le « mysterium lunæ » et provoque ce mal si grave qu’est la mondanité spirituelle (d’après Henri de Lubac, c’est le pire qui puisse arriver à l’Église). »
Jorge Mario Bergoglio (quelques jours avant de devenir le Pape François)
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Qu’est-ce qu’une secte ?

Définition du père Jacques Trouslard : La secte est un « groupe » constitué à l’origine sous la direction, la domination d’un maître à penser, autoproclamé, communément appelé « gourou », qui, par l’emploi de manœuvres frauduleuses, promesses, menaces, abus d’autorité ou de pouvoir, machination ou artifices, utilisation de techniques de conditionnement ou de contrainte morale, provoque chez ses adeptes une situation de faiblesse, de vulnérabilité, de dépendance et de complicité qui leur fait perdre tout esprit critique et tout libre arbitre pour tout ce qui concerne les théories, les méthodes ou les pratiques de la secte. Bref, un groupe qui utilise des procédés répréhensibles dans un but d’aliénation des adeptes et à des fins financières ou commerciales. [1]

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Secte ou dérive sectaire ?

Le terme de secte a le désavantage de supprimer les nuances qu’on trouve dans le phénomène sectaire. De ce point de vue, l’expression « dérive sectaire » semble plus adaptée puisqu’elle indique d’emblée qu’il y a des différences de degrés et de dangerosité entre les communautés déviantes.

Néanmoins, la majorité des spécialistes reconnaissent que lorsqu’un certain nombre de conditions sont remplies, on peut véritablement parler de « secte », sans ambiguïté.

Pour donner une image, on pourrait dire que la dérive sectaire est à la secte, ce que le vent est à la tornade. Certes, on peut réduire en dernière analyse la tornade à n’être que « du vent »… Cependant nous savons bien qu’une tornade fait beaucoup plus de dégâts que de simples coups de vent.

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Des sectes dans l’Eglise, n’est-ce pas contradictoire ?

Il est vrai que l’Eglise possède un certain nombre de garde-fous censés la protéger, en théorie, contre les dérives sectaires : elle possède un Droit, des textes normatifs, des instances de contrôles… Ajoutons à cela que, contrairement à de nombreuses dérives sectaires issues du protestantisme, les catholiques n’ont pas la liberté d’interpréter les Ecritures à leur guise et doivent se référer au Magistère et à la Tradition, ce qui limite considérablement les risques de déviances.

Cela suffit-il pour immuniser parfaitement l’Eglise contre les dérives sectaires ?

Non. Nos différentes expériences nous ont permis de découvrir que certaines communautés arrivent à contourner, duper et pour ainsi dire mettre en échec le système immunitaire de l’Eglise. C’est assez surprenant et difficile à comprendre, car ces communautés doivent alors assumer un certain nombre de contradictions (Comme par exemple le fait de défendre dans ses discours extérieurs la liberté de conscience quand les modes de fonctionnement internes de la communauté excluent radicalement toute forme de dissidence et de remise en question).

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Qu’est-ce que le phénomène d’emprise ?

Au cœur de la secte se trouve le phénomène d’emprise, un processus psychologique complexe, invisible et extrêmement destructeur. Pour la psychologue Marie-France Hirigoyen, il s’agit d’une effraction :

On envahit le territoire psychique de la personne, on lui retire tout esprit critique pour lui imposer un modèle de pensée qui l’aliène. Cette intrusion se fait par le dénigrement, la violence morale ainsi que par l’agression physique qui est une façon de marquer le corps de l’autre en laissant une trace qui provoque la peur et par suite l’obéissance. (…) Le but est de dominer et de soumettre la personne. Il s’agit d’une manipulation mentale et verbale qui emploie des moyens de persuasion coercitifs de nature affective et émotionnelle, sans oublier le chantage. En définitive, cette situation prive les personnes de tout jugement personnel. [2]

Notons ici que les abus sexuels et les abus spirituels ont la même racine, ce qui fait dire à Pascal Zivi, grand spécialiste du phénomène sectaire :

Après avoir lu de nombreux témoignages et discuté avec des victimes d’abus sexuels (commis par des prêtres ou des pasteurs), j’ai observé un point commun dans toutes ces expériences : les personnes abusées sexuellement ont premièrement été abusées spirituellement par leur responsable spirituel. L’abus spirituel a précédé l’abus sexuel. [3]

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Quelle est la différence entre le phénomène d’emprise et le contrôle de l’esprit ?

La langue française a la chance de disposer du terme spécifique « d’emprise ». En anglais, devant l’absence d’un terme équivalent, les psychologues ont eu recours à l’expression « Mind control » (contrôle de l’esprit). Cette expression se focalise plus sur le phénomène cognitif qu’à la relation perverse entre le prédateur et sa proie.

Le psychologue Steven Hassan souligne que le contrôle de l’esprit se décompose en quatre composantes [4] :

  • le contrôle du comportement,
  • le contrôle des pensées,
  • le contrôle des émotions,
  • le contrôle de l’information.

Si ces quatre composantes peuvent être contrôlées, alors l’identité d’une personne peut être systématiquement manipulée et modifiée.  [5]

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Pourquoi pinailler alors que les membres de ces communautés affirment tous qu’ils sont heureux ?

Toute la difficulté repose sur le fait que le phénomène sectaire génère des mécanismes d’auto-suggestion redoutables. Dans une secte, l’adepte apprend à renier sa propre identité et à se mentir à lui-même. Une personne sous emprise prétendra toujours qu’elle est parfaitement heureuse, même si elle ne l’est pas du tout ! Et c’est la raison pour laquelle il convient d’être très vigilant avec les témoignages des personnes qui sont en état de sujétion, parce qu’elles ont un besoin compulsif et irrationnel de défendre leur vocation, leur groupe et leur gourou.

Pour sortir de ces mécanismes extrêmement pervers, il ne suffit pas de sortir physiquement de la secte : il faut faire une relecture critique de son expérience personnelle, de préférence avec des personnes qualifiées. Et cela peut prendre des mois, voire des années.

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A quoi reconnait-on une dérive sectaire dans l’Eglise ?

La liste qui suit est une synthèse que nous avons établi à partir de plusieurs grilles d’identification des dérives sectaires (notamment celle de l’ICSA [6] et celle de Pete Vere [7]), et que nous avons adapté aux cas particuliers des dérives sectaires dans l’Eglise catholique :

  1. La communauté affiche un engagement excessif, aveugle et indiscutable envers son fondateur (que ce dernier soit en vie ou mort) et considère ses pensées et ses pratiques comme LA vérité absolue. Si le fondateur fait l’objet de légendes improbables, qu’on lui attribue des miracles ou des expériences mystiques extraordinaires… mais qu’il ne suit pas le rythme et les exigences de la communauté, alors soyez sur vos gardes !
  2. La communauté exige une fidélité absolue de la part des membres. Les réflexions critiques, les doutes et toutes formes de dissidence sont découragées, voire punies. Ceux qui osent émettre la moindre contestation sont immédiatement isolés, exclus de toute responsabilité et diabolisés. La délation, justifiée par de pieuses raisons, est institutionnalisée. Les courriers des membres de la communauté sont tous contrôlés par les supérieurs.
  3. Les dirigeants induisent des sentiments de honte et de culpabilité de façon à influencer et contrôler les adeptes. En règle générale, cela se fait à travers la pression des autres adeptes et des formes subtiles de persuasion et d’auto-suggestion : ainsi, certaines communautés déviantes exigent que leurs membres fassent deux, trois ou quatre examens de conscience par jour, en suivant des questionnaires au ton inquisitorial et culpabilisant, qui induisent à voir le mal partout.
  4. La communauté est obsédée par le recrutement et n’a pas peur d’employer des méthodes « musclées » pour améliorer ses résultats : chantage affectif, discours culpabilisants, mensonges, love bombing, fausses révélations, etc. Si votre communauté recrute beaucoup, n’y voyez pas nécessairement le signe d’une bénédiction divine : à une époque de pénurie des vocations, il est probable que la congrégation envoie des « recruteurs » avec du chiffre à faire, qui se fichent pas mal du bien réel des jeunes qu’ils accompagnent.
  5. La communauté prône une adhésion totale et inconditionnelle au Pape. Signe de grande ferveur ? Pour les communautés sectaires, la sur-exaltation affichée de l’amour envers les autorités religieuses n’est qu’un moyen de gagner des soutiens et des cautions morales au sein de la hiérarchie catholique… ainsi qu’une façon d’écraser en interne toute forme de dissidence (Ainsi, si vous osez critiquer certains aspects du fonctionnement de la congrégation, on vous fera vite comprendre que vous remettez en cause le jugement du pape et de toute la sainte Eglise Catholique !)
  6. La communauté limite autant que possible le temps de sommeil de ses membres, leur impose un rythme vie démentiel et dédie un temps considérable aux actes de piété, en privilégiant des prières répétitives et/ou euphoriques. Dans une communauté sectaire, ces pratiques servent en fait à altérer l’état de conscience des membres, pour obtenir un contrôle absolu sur eux et les empêcher de penser par eux-mêmes, en dehors du cadre. Notons que la prière, qui est le cœur de toute vie religieuse, est ainsi dévoyée de sa finalité en devenant un instrument de manipulation mentale.
  7. Les supérieurs transgressent certaines règles établies dans le Code de Droit Canonique ou profitent de zones d’ombre dans la juridiction de l’Eglise pour n’en faire qu’à leur tête. Ainsi, certaines communautés ne respectent pas, ou seulement en apparence, la distinction entre le for interne et le for externe ; Certaines exercent de terribles pressions psychologiques sur les religieux pour les obliger à professer, ou à être ordonnés (parfois juste pour impressionner les autorités ecclésiastiques !) ; Certaines communautés profitent d’une absence de réglementation concernant les instituts de vie consacrée, pour proposer des modèles expérimentaux de vie religieuse dans lesquels les membres n’ont en fait aucune protection juridique : c’est ainsi que les jeunes membres peuvent être sur-exploitées pendant des années… puis jetés à la rue du jour au lendemain lorsqu’ils ne servent plus à rien ou qu’ils commencent à poser trop de questions.
  8. Les dirigeants imposent, jusque dans les moindres détails, le mode de pensée, d’action et de vie que les membres doivent adopter. Rien n’est laissé au hasard : la façon de marcher, de s’habiller, de s’assoir, de rire, de monter des escaliers, de manger des spaghettis… Grâce à cette sur-réglementation, les dirigeants infantilisent et écrasent les individualités sous le poids de l’uniformité du groupe.
  9. La communauté passe un temps considérable à lire et relire (souvent au détriment d’autres lectures, comme la Bible) les lettres et les grands discours lénifiants et pleins d’emphase du fondateur. Ces lectures enseignent ou sous-entendent généralement que la fin (« instaurer le Règne du Christ »), justifie n’importe quels moyens pour y parvenir.
  10. La communauté refuse de s’incorporer dans le tissu de l’Eglise locale et de collaborer avec les autorités diocésaines. Pour cela, les communautés sectaires essayent souvent d’obtenir le statut de « congrégation de droit pontifical » ou de « prélature particulière du pape », afin d’échapper au contrôle des évêques locaux.
  11. La communauté impose des pénitences spéciales et sévères (port du silice, auto-flagellation, jeûnes…). Bien sûr, rien n’empêche une communauté de choisir un style de vie dépouillé et ascétique, si les religieux ont fait un véritable discernement pour cela. Le problème, c’est que dans les communautés sectaires, les membres – qui sont parfois entrés très jeunes dans les petits séminaires de la communauté – sont contraints d’accepter des pénitences qu’ils n’ont pas du tout choisies.
  12. Les dirigeants entretiennent un sentiment de paranoïa à l’égard du monde extérieur, des autorités civiles, des autres religions ou de quelques sociétés secrètes (les juifs, les francs-maçons, les musulmans, etc.). Ce délire de persécution conduit la communauté à s’isoler du monde extérieur, à exercer un contrôle absolu sur l’information et à imposer une culture du secret à tous les membres. Cela produit des zones d’impunité qui dégénèrent souvent en conflits avec la société civile (Le monde étant mauvais, ou cherchant à détruire notre communauté, nous n’avons pas nous soumettre à ses lois). C’est ainsi que lorsqu’un membre se met à abuser sexuellement d’enfants, les dirigeants préfèrent étouffer le scandale et déplacer le pédophile à l’autre bout du monde, plutôt que de livrer ce dernier à la justice.
  13. Les membres de la communauté doivent couper tous leurs liens d’avec leurs familles et leurs amis, sauf avec celles et ceux qui peuvent servir aux intérêts du groupe. Attention : L’Eglise a une longue et honorable tradition de communautés cloîtrées ou érémitiques qui sont séparées des activités habituelles du monde extérieur. Cependant, un tel choix de vie requiert un discernement approprié. D’autre part, tout est question de mesure : Même les congrégations les plus sévères encouragent certaines formes de communication avec les familles et les gens de l’extérieur.
  14. Le groupe est obsédé par la recherche de fonds. C’est pourquoi l’une des principales missions des membres de la communauté, outre le recrutement de nouveaux membres, va consister à chercher de l’argent. La communauté cible de préférence des proies vulnérables (comme des personnes âgées et veuves) et les met en état de sujétion, pour ensuite accaparer leur héritage. Les dirigeants des communautés déviantes pressent également leurs membres à faire don aussi vite que possible de leurs économies personnelles et de leurs héritages familiaux à la communauté.
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Le Christ ne préconise-t-il pas de juger l’arbre à ses fruits ?

Précisément. Mais attention : beaucoup d’erreurs ont été commises à cause d’une interprétation hâtive et maladroite de ce conseil évangélique. Reprenons la parabole du Christ :

« Méfiez-vous des faux prophètes, qui viennent à vous déguisés en brebis, mais au-dedans sont des loups rapaces. C’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez. Cueille-t-on des raisins sur des épines ? ou des figues sur des chardons ? Ainsi tout arbre bon produit de bons fruits, tandis que l’arbre mauvais produit de mauvais fruits. Un bon arbre ne peut porter de mauvais fruits, ni un arbre mauvais porter de bons fruits. » Mt 7, 16-18

Notons que la parabole est constituée de deux parties : D’abord le Christ affirme que « Tout arbre bon produit de bons fruits », et son corollaire : « l’arbre mauvais produit de mauvais fruits ». Ensuite, comme s’il sentait le besoin de supprimer les ambiguïtés, le Christ ajoute qu’ : « Un bon arbre ne peut porter de mauvais fruits, ni un arbre mauvais porter de bons fruits ». Un logicien dira que dans la première partie, le Christ pose une « condition suffisante » (si l’arbre est bon, il produit de bons fruits), et que dans la seconde partie, il pose une « condition nécessaire » (si et seulement si l’arbre est bon, il produit de bons fruits). Autrement dit, il n’est pas possible de dire qu’un mauvais fondateur produise de bons fruits… sans tordre le cou à l’enseignement du Christ, lequel a anticipé nos éventuels doutes en établissant une règle explicite et nécessaire, qui ne supporte aucune exception.

L’explication est donc à rechercher du côté des fruits. Ces fameux fruits qui enthousiasment tant les autorités de l’Eglise… sont-ils si bons qu’ils en ont l’air ?

En effet, le Christ ne prétend pas que le mauvais arbre est stérile, ou qu’un arbre bon devrait porter BEAUCOUP de fruits… mais que les fruits du mauvais arbre sont MAUVAIS. Il faut distinguer les FRUITS APPARENTS des FRUITS REELS. Contrairement à ce qu’on imagine trop souvent, le mauvais arbre produit de NOMBREUX et BEAUX FRUITS, qui SEMBLENT BONS à première vue, mais qui sont en fait extrêmement nocifs. D’ailleurs, qu’un arbre mauvais produise de beaux fruits n’a rien d’étonnant. Le démon ne tente pas ses proies avec des fruits moches et flétris, comme l’enseigne le texte de la tentation au livre de la Genèse : « La femme vit que les fruits de l’arbre étaient agréables à regarder, qu’ils devaient être bons et qu’ils donnaient envie d’en manger » (Gn 3, 6).

En conclusion, nous pouvons dire que :

  • Si le fondateur d’une communauté s’avère être un affreux manipulateur, intriguant et cynique, sa communauté portera nécessairement des mauvais fruits (voir la liste dans la question suivante)
  • Inversement, si on découvre qu’au delà des apparences, une communauté produit des mauvais fruits, cela signifie que son fondateur n’est sans doute pas aussi saint qu’on le prétend.
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Alors quels sont les « mauvais fruits » produits par ces « mauvaises communautés » ?

1) Du côté des membres de ces communautés :

  • Emprise sur les consciences ;
  • Immaturité, voire infantilisme ;
  • Egocentrisme, orgueil spirituel (mépris de la vie diocésaine et des autres sensibilités religieuses) ;
  • Dissonance cognitive, clivages de conscience, déni ;
  • Pratique habituelle du mensonge, de l’intrigue, de la manipulation ;
  • Superstition (Par exemple : utilisation du pendule pour administrer des médicaments ; cérémonies d’exorcisme - avec des mises en scènes grotesques - pour soigner les crises vocationnelles, etc) ;
  • Tendance à tout spiritualiser ;
  • Psychorigidité ;
  • Désorganisation constante faisant lourdement peser sur les autres le poids du quotidien à assumer, pour se garder l’exclusivité de la « meilleure part » : celle d’une prière sans travail ni contrainte ;
  • Conception de la pauvreté faussée par une vision altérée de la Providence, et son paradoxe : un appel insistant aux dons d’argent ;
  • Exploitation des plus faibles, esclavagisme ;
  • Complaisance pour tout ce qui brille (faste liturgique qui séduit les foules, souci de donner plus d’importance à la forme qu’au fond, à la lettre qu’à l’esprit).
  • Détresse morale et spirituelle, impression de sombrer dans la folie ;
  • Méfiance compulsive ;
  • Vision déformée de la miséricorde de Dieu ;
  • Narcissisme, vision érotisée du prêtre ;
  • Frustrations affectives, désordres sexuels ;
  • Dépression chronique ;
  • Suicide

2) Du côté des anciens membres :

  • Sentiment étouffant d’inutilité, de déphasage, d’échec ;
  • Instabilité, difficultés à se concentrer ;
  • Cauchemars, insomnies ;
  • Colère, besoin de transgression ;
  • Chagrin pour les autres membres de la communauté ;
  • Mauvaise estime de soi ;
  • Flashbacks, crises d’angoisse ;
  • Sentiment d’être incompris, repli sur soi, mutisme ;
  • Dégoût de tout ce qui a trait à la spiritualité et à la religion ;
  • Difficultés à prendre des décisions ;
  • Difficultés à se réinsérer dans le monde du travail ;
  • Comportements destructeurs : Alcoolisme, tabagisme, toxicomanie ;
  • Conflits familiaux ;
  • Hyperactivité sexuelle ou, au contraire, perte totale de désir sexuel ;

3) Du côté de l’Eglise et de la société civile :

  • Pertes de vocations, à un niveau plus général. (Contrairement à ce que la communauté donne à voir, le pourcentage de persévérance dans les communautés sectaires est extrêmement faible. Beaucoup de jeunes, qui auraient sans doute fait de très bons prêtres dans d’autres conditions, sortent cassés, parfois dégoûtés à vie de la religion) ;
  • Familles détruites, écœurées ;
  • Discrédit général de l’institution catholique (Notamment à cause des scandales à répétition) ;
  • Légitimation des systèmes politiques générant des injustices sociales (en se mettant du côté des riches et des puissants, certaines communautés sectaires cautionnent l’iniquité, au nom de l’Eglise et du Christ) ;
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Pourtant, il y a des conversions grâce à ces communautés. N’est-ce pas le signe d’une bénédiction divine ?

Même si une réponse absolue et définitive à cette question est impossible car seul Dieu « sonde les cœurs et les reins » [8], il est important de rappeler que toute conversion – quand il ne s’agit pas d’une simple émotion épidermique provoquée par un contexte euphorisant – vient d’abord de Dieu, et non des hommes. Or ce n’est pas parce qu’une chose arrive « avant » une autre, qu’elle en est la « cause ». Quand on confond la succession et la causalité, on fait une erreur que les logiciens appellent « le sophisme de la fausse cause ». Une expérience authentique de conversion peut être produite « à l’occasion » d’un rassemblement de prière, mais ne peut jamais être produite « grâce à » ce rassemblement, car la conversion est toujours un don de Dieu [9].

Maintenant, une question demeure : si ces communautés étaient si mauvaises qu’on le dit… pourquoi le Bon Dieu y dispenserait-il sa grâce ? Jetterait-il les perles aux pourceaux ? Cautionnerait-il des communautés aux modes de fonctionnement pervers ?

Pour pouvoir répondre à cette question, il est nécessaire de faire appel à ce que les théologiens appellent la « kénose » [10], et plus précisément la kénose de la Création [11]. Ce concept, qui se traduit littéralement par « l’anéantissement de Dieu », signifie que Dieu s’est effacé de la Création pour permettre à l’homme d’assumer pleinement sa liberté. S’il était visible et omniprésent, sa volonté s’imposerait à nous, et nous ne serions que des jouets entre ses mains… Or, son intention n’est pas de faire de nous des instruments, mais de nous faire grandir dans notre humanité. Concrètement, cela veut dire que lorsque Dieu se manifeste, c’est généralement de façon discrète, et en respectant les « canaux » qu’il a lui-même institué, à savoir ceux de son Église. Et c’est pourquoi Dieu dispense sa grâce indifféremment à toutes les communautés catholiques (ce qui ne veut pas dire qu’il ne dispense sa grâce qu’aux communautés catholiques), qu’elles soient saines ou pas : « car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et envoie sa pluie sur les justes et sur les injustes. » [12]

Certains affirment cependant qu’il y aurait plus de conversions dans certaines communautés que dans d’autres. Mais ceci reste encore à prouver, car les conversions dans les communautés « sectaires » font surtout beaucoup plus de bruit que dans les communautés où l’on respecte l’intimité et la liberté des personnes.

Les interprétations providentialistes sont toujours très dangereuses et illégitimes : ce n’est pas parce qu’il y a beaucoup de conversions dans une communauté, que cette communauté est bonne. Parfois, c’est même le contraire qui est vrai. C’est sans doute pourquoi le Christ nous a lui-même clairement mis en garde : « Ce n’est pas en me disant : "Seigneur, Seigneur", qu’on entrera dans le Royaume des Cieux, mais c’est en faisant la volonté de mon Père qui est dans les cieux. Beaucoup me diront en ce jour-là :"Seigneur, Seigneur, n’est-ce pas en ton nom que nous avons prophétisé ? en ton nom que nous avons chassé les démons ? en ton nom que nous avons fait bien des miracles ?" Alors je leur dirai en face :"Jamais je ne vous ai connus ; écartez-vous de moi, vous qui commettez l’iniquité." » [13]

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Pourquoi Dieu appellerait-il des personnes à se consacrer dans des « mauvaises » communautés ?

il n’y a pas d’appel à vivre ou subir un mensonge. Il n’y a pas de vocation liée à un chemin déviant et faux. La vocation est un appel personnel, qui emprunte tel ou tel chemin et s’inscrit quelquefois dans un cadre dont la spiritualité est définie.

De nombreux témoignages laissent entendre que, dans certaines communautés sectaires, « l’appel de Dieu » est très largement suggéré par des techniques qui n’ont pas grand chose à voir avec l’Évangile (chantage affectif, culpabilisation, etc). Si bien qu’il est possible - et même assez probable - que les membres des communautés sectaires n’aient jamais reçu le moindre appel divin, mais qu’ils aient été simplement convaincus du contraire par des manipulations mentales.

Ajoutons que l’appel à la vie religieuse, dans la tradition de l’Église Catholique, ne se présente jamais comme une fatalité univoque qu’il faudrait accepter servilement sans se poser de questions. Quand le Christ appelle à le suivre, il le fait toujours sur le ton de l’invitation, et non de la contrainte. Le mystère de l’incarnation, cœur de la foi chrétienne, met en avant que c’est la plénitude de l’humanité qui est engagée dans toute démarche religieuse et vocationnelle. Faire de la vocation un impératif, auquel serait conditionné la miséricorde de Dieu, c’est n’avoir strictement rien compris à l’Évangile.

Tout discernement authentique doit donc prendre en compte, avec un respect infini, la liberté personnelle des candidats. Et il ne s’agit pas ici d’une liberté théorique, de discours fumeux, en contradiction avec la « praxis ».

Hélas, les communautés déviantes n’encouragent jamais leurs membres – ou seulement quand il faut sauver les apparences – à prendre du recul ou à découvrir d’autres réalités de l’Église. Il y a des techniques de conditionnements qui rendent tout discernement pratiquement impossible.

Si une communauté fait pression sur vous pour vous obliger à rentrer dans ses rangs, un conseil : partez en courant !

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Mais pourquoi les anciennes victimes ne se font pas entendre ?

C’est vrai : pendant des années, très peu de victimes osaient dénoncer leurs anciennes communautés (Même si depuis les scandales qui ont éclaté ces dernières années, un certain nombre de langues a commencé à se délier). Il faut savoir que les anciens membres des communautés déviantes sont dans des situations souvent très complexes, qui le obligent à garder le silence :

  • Certains ont décidé de tourner la page, de façon définitive, parce qu’ils ont trop souffert dans leur ancienne communauté. Cette partie de leur passé est une zone d’ombre dont la seule évocation est tellement douloureuse, qu’ils ont décidé de ne plus jamais en parler.
  • D’autres « ne veulent pas avoir de problèmes », ou pensent que c’est une cause perdue d’avance. Parfois, avec quelques amis très proches, ils osent quelques critiques. Mais par crainte des représailles, ils préfèrent ne pas s’exposer en public.
  • Certains ont encore un frère, une sœur ou un autre membre de leur famille dans leur ancienne communauté. Ils savent que s’ils parlent, ils risqueraient de perdre tout contact et préfèrent donc ne pas prendre ce risque.
  • Il y a tous ceux qui sont devenus dépressifs. Ils n’ont ni la force ni les capacités de dénoncer les abus dont ils ont été victimes, tant cette expérience les a brisé. Certains sombrent d’ailleurs dans l’alcoolisme, et parfois même dans la drogue.
  • Omerta encore chez ceux qui ont commis des fautes graves, voire des crimes, quand ils étaient dans leur communauté : abus de faiblesse, escroquerie, malversation, abus sexuels. Ils sont tous tenus par un « pacte de silence » pervers : mon silence contre votre silence.
  • Ceux qui sont entrés très jeunes ou ont même été élevés dans une communauté, ont vu les supérieurs de cette communauté prendre la place de leurs propres parents. Pour eux, un travail de relecture critique est une expérience traumatisante, une sorte de parricide.
  • Il y a tous ceux à qui leur ancienne communauté avait autrefois demandé de raconter leur témoignage vocationnel, sur une page Internet ou dans une revue chrétienne. Poussés par les pressions du système, ils ont enjolivé leur histoire à l’excès et leurs témoignages ont été publiés avec des titres ronflant comme « Choisi de toute éternité ! » ou « J’ai été saisi par l’appel de Dieu ! ». Difficile, après de telles déclarations pleines de lyrisme et d’emphase, de remettre en cause leur précédente communauté, bien entendu.
  • Certains sont issus de familles très catholiques, dans lesquelles il est impensable d’émettre la moindre critique sur une congrégation religieuse reconnue et appréciée par le Vatican.
  • D’autres anciens se taisent pour de simples raisons économiques : après avoir passé dix, vingt ou trente ans dans une communauté, ils ont pris un retard considérable dans la vie active. Quand on commence sa vie professionnelle à 35 ou 45 ans et qu’on n’a jamais cotisé pour sa retraite, il est difficile de perdre du temps, de l’énergie et de l’argent pour se battre contre sa précédente communauté.
  • Après avoir quitté leur congrégation, certains continuent de travailler néanmoins dans une école ou un centre de formation qui appartient à cette même congrégation. Difficile d’imaginer qu’ils vont scier la branche sur laquelle ils sont encore assis.
  • Certains ont voulu parler, mais ils ont vite été dissuadés par les bons conseils de leurs proches : « Laisse cela dans les mains de l’Église ! », « Tu n’as donc pas confiance dans le jugement de l’Église ? », « Tourne la page ! », « Tu manques certainement d’humilité pour critiquer une congrégation reconnue par le Vatican ! », « Ne vois-tu pas que le démon va t’utiliser pour faire du mal à l’Église ? ».
  • Il y a tous ceux qui se rappellent, avec frayeur, de la façon dont on parlait des « traîtres » dans leur précédente communauté. La seule pensée de faire partie de cette liste noire, d’être considéré comme un infâme « Judas », les terrorise et les dissuade à tout jamais d’accomplir un quelconque devoir de conscience, que la congrégation assimilera systématiquement à de la calomnie.
  • Il y a également ceux qui ont rejoint le clergé diocésain et qui reçoivent, de façon plus ou moins explicite, la consigne de se taire.
  • Et enfin, il y a les prisonniers : c’est-à-dire tous ceux qui sont restés sous l’emprise de leur précédente communauté. Ce sont des personnes dangereuses : Minées intérieurement par la culpabilité, elles sont prêtes à tout pour se racheter aux yeux de leur ancienne communauté, et de leur conscience fragile.

Les communautés sectaires sont conçus comme des machines à faire taire la voix des prophètes.

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[3ZIVI P. & POUJOL J., Les abus spirituels. Identifier, accompagner. Ed. Empreinte temps présent. 2006, p.35

[4HASSAN S, Combatting Cult Mind Control, 1988

[5http://freedomofmind.com/Info/faq.php Steven Hassan s’est appuyé sur les travaux de Leon Festinger, père de la théorie de la dissonance cognitive.

[8Ps 7,10

[9Rm 2,8 ; Ph 1,29 ; 1 Cor 1, 12-13 ; 2 Pi 1,3

[10Ph 2,7

[12Mt 5,45

[13Mt 7, 21-23

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