Céline Hoyeau face à la « trahison des pères » des nouvelles communautés

Avec l’aimable autorisation d’Anthony Favier
Lundi 14 juin 2021

Note de lecture Céline HOYEAU , la Trahison des pères, emprise et abus des fondateurs de communautés nouvelles, Montrouge, Bayard, 2021, 352 p.

Sur le blog d’Anthony Favier : http://anthony.favier.over-blog.com/2021/04/celine-hoyeau-analyse-la-trahison-des-peres.html

Chef adjointe du service religion du journal la Croix, Céline Hoyeau signe chez Bayard un ouvrage qui s’intéresse à la « trahison » des pères. Derrière ce terme, il faut entendre les fondateurs de ces « nouvelles communautés » qui ont fortement influencé le catholicisme français du derniers tiers du 20e siècle.

En dépit de sa valeur documentaire certaine et sa sincérité indéniable, l’ouvrage ne risque-t-il pas de nourrir, encore une fois, un récit anti-années 68 et anti-Vatican 2, en imputant des responsabilités indues à des secteurs du catholicisme français qui étaient pourtant complètement étrangers à ces communautés ?

Les désillusions de la génération Jean Paul II Le livre est le récit d’une prise de conscience : celui d’une catholique qui ne cache pas sa socialisation précoce dans l’univers de ces nouvelles communautés avant de découvrir en tant que journaliste ce qu’elle appelle elle-même « l’envers du décor » :

« Lycéenne, je dévore chaque mois les éditoriaux d’Éphraïm dans Feu et lumière, la revue de spiritualité de la communauté des Béatitudes, qu’il a fondée […] Au Festival des jeunes organisée par le Chemin Neuf à Hautecombe, à l’été 1993, je suis frappée par le témoignage humble et bouleversant de Jean Vanier et je ferai de La Communauté, lieu de pardon et de la fête mon livre de chevet. À l’époque, mes amis proches partent pour les bidonvilles de Roumanie ou d’Amérique latine, fondée par le père Thierry de Courcy, qui les envoie vivre l’amitié gratuite et la compassion auprès des enfants des quartiers les plus pauvres de la planète… […] Moi, je rêve de suivre Mère Teresa et pars servir dans un hospice de Bénarès pendant deux mois. »

La Trahison des pères, p. 7-8

« Oui, je suis de la génération Jean-Paul II. Tous ces fondateurs de communautés nouvelles et maîtres spirituels qui se revendiquent de lui sont, à nos yeux, les prophètes de la nouvelle évangélisation en marche. Et leurs disciplines, l’avenir de l’Église. Et pourtant…Devenue journaliste, je tombe de haut, l’envers du décor m’apparaît peu à peu. À Rome d’abord où […] je découvre amèrement la double vie de certains prêtres. Puis une dizaine plus tard, au service »Religion« du quotidien La Croix, je suis amenée, au fil des mois, à enquêter sur les dérives de ceux qui ont inspiré mes jeunes années. »

Idem, p. 9-10

« C’est sûrement là l’aspect le plus réussi de l’ouvrage de Céline Hoyeau : un travail de relecture des tristes révélations affectant, depuis trois décennies désormais, de nombreuses organisations catholiques, qui avaient été pourtant citées en exemples pour leur dynamisme particulièrement sous le pontificat de Jean-Paul II. L’auteure affronte sans détour ce qui lui pose des problèmes de conscience et elle se met en recherche d’un sens auprès d’experts de différents champs disciplinaires (historiens, psychologues, théologiens, canonistes). Si on n’est pas obligée de la suivre dans ses conclusions, elle a le mérite de se confronter à une réalité dont la prise de conscience reste parfois encore difficile dans certains secteurs du catholicisme français. »

Un ouvrage à valeur documentaire La Trahison des pères a une autre qualité : rassembler, dans un seul document, de nombreuses informations qui, jusqu’à présent, étaient éclatées dans des articles de presses auxquels il n’est pas toujours facile d’accéder ou sur des sites de victimes pas toujours très bien référencées. Le premier chapitre « la chute des étoiles » (p. 19-52) est ainsi un récit, assez glaçant, mais très informé des dérives qui ont touché plusieurs nouvelles communautés françaises et des liens qu’elles entretiennent entre elles. Dans cet inventaire, on trouvera certains lieux dont elles avaient la charge ou bien de certains de leurs membres fondateurs ou charismatiques :

  • l’Office culturel de Cluny (OCC) d’Olivier Fenoy,
  • le foyer de la charité de Tressaint (Côtes d’Armor) dirigé par André-Marie van der Borght,
  • Gérard Croissant, alias frère Éphraïm, fondateur de la Communauté des Béatitudes, et son beau-frère Philippe Madre,
  • Thierry de Roucy, ancien supérieur de l’abbaye d’Ourscamp (Oise) et ses fondation Points-Cœur, les Servantes de la Présence de Dieu et la Fraternité Molokaï,
  • Marie-Pierre Faye et la Fraternité de Marie, Reine immaculée,
  • Jacques Marin, Georges et Marie-Josette de la Communauté du Verbe de Vie,
  • Jacky Parmentier et la communauté de la Sainte-Croix,
  • Pascal et Marie-Annick Pingault de la Communauté du Pain de Vie,
  • Jean-Michel Rousseau de la communauté Fondacio (sous ses différentes dénominations),
  • Mansour Labaky et son orphelinat de Douvres-la-Délivrande (Calvados),
  • Jean Vannier et la communauté de l’Arche,
  • Georges Finet et les foyers de la Charité.

Toutes ces organisations et leurs auteurs ont été touchés à un moment ou à un autre par une sanction canonique ou civile ou visé par un rapport d’enquête diligenté suite à des plaintes. La journaliste précise que cette liste, déjà vertigineuse, « pourrait encore s’allonger » (p. 48) notamment avec des investigations (encore en cours) autour de la figure de Pierre-Marie Delfieux, fondateur des Fraternités monastiques de Jérusalem, ou bien au sein de la Famille monastique de Bethléem, au point que Céline Hoyeau peut conclure : « l’Église compte de belles figures mais, finalement, peu de fondateurs parmi les plus connus semblent réchapper à la chute » (p. 14). Au cours de l’ouvrage, d’autres organisations apparaissent, à l’existence plus ou moins brève, souvent démantelées par des évêques inquiets.

Le cœur de l’ouvrage est assurément le chapitre 7 « généalogie d’un abus » (p. 281-339) qui revient sur les réseaux que forment les agresseurs entre eux. Une version dans la presse était déjà sortie, concomitamment à la parution de l’ouvrage, dans La Croix sous le titre « enquête sur les frères Philippe : des années d’abus en toute impunité » (22 février 2021). Il s’agit d’une proposition d’interprétation des connexions qui se sont établies entre le dominicain Pierre Deheau (« Thomas » en religion), ses deux neveux également dominicains – en religion Thomas Philippe et Marie-Dominique Philippe – et Jean Vannier, Gérard Croissant/frère Éphraïm et Thierry de Roucy. De manière assez convaincante, la journaliste met au jour la méthode commune des agressions : leur justification au cours d’accompagnements spirituels au motif que les directeurs étaient des « ’instruments de Dieu » et auraient compris la nature particulière des rapports charnels qu’entretenaient Marie et Jésus… Pour Céline Hoyeau, on peut même parler d’une « gnose », une doctrine cachée à laquelle les maîtres initiaient certains disciples choisis.

Les années Vatican implicitement 2 en procès ? Dans l’introduction, Céline Hoyeau affirme de ne pas s’être lancée de gaieté de cœur dans cette enquête et se soumettre à une recherche dénuée de parti pris :

« ce c’est ni mue par un quelconque agenda idéologique, – la revanche des progressistes contre les charismatiques et les ’tradis’ –, ni par besoin de régler des comptes ou par désir de vengeance »

La Trahison des pères, p. 14.

Dans une conférence que j’avais faite à Lyon, je m’étais demandé : « la faute à qui ? », en développant l’idée que, en la matière des abus, il fallait bien se garder de schémas trop simplificateurs. Ce qui est tentant quand on manie l’histoire c’est de sauter vite des corrélations aux causalités si ce n’est aux responsabilités. Je présentais schématiquement les deux grands paradigmes d’analyse des crises catholiques des dernières décennies. Le premier initié par le Pape François lui-même dans sa Lettre au Peuple de Dieu est celui du « cléricalisme » : une conception erronée du sacerdoce et de la différence entre baptisés nourrirait un système déséquilibrée permissif à tous les excès. Un second, qui s’origine dans un texte de Benoît XVI, recourt beaucoup plus à une relecture pessimiste des années 1960-1970, une une variante du discours anti-Mai 68 du champ laïc appliqué aux années Vatican 2.

Force est de constater que Céline Hoyeau s’inscrit beaucoup plus dans ce deuxième système explicatif (sans exclure nécessairement la critique du cléricalisme). Implicitement, l’essai tend à blâmer les chrétiens d’ouverture des années post-concile dont la fragilité et le laxisme du catholicisme qu’ils auraient édifié auraient laissé la voie libre aux fondateurs des nouvelles communautés. Ces derniers auraient comme comblé un vide. De même, une forme de crise de la masculinité qui aurait suivi l’émancipation féminine aurait appelé des nouveaux « pères ». Loin de s’inscrire dans une généalogie conservatrice ou réactionnaire, les fondateurs peuvent être présentés comme une juste compensation par rapport aux défaillances passées :

« Si ces maîtres spirituels ont suscité un attrait si puissant dans les années 1970 et par la suite, c’est manifestement parce qu’ils sont apparus à un certain nombre de catholiques, déstabilisés par les lendemains du Concile, comme les sauveurs d’une Église en crise. »

p. 67

« L’époque de rupture avec une société patriarcale, l’explosion de tous les repères après Mai 68, ont pu entraîner, en retour, une grande fragilité et un besoin fort de référents. Face à un monde complexe, qui se sécularisait à grande vitesse, et à une Église dans la tourmente, n’était-il pas plus simple de se fier à un »père« qui savait garder le cap, répondre à toutes les questions branché directement sur le Saint Esprit, élu par Dieu pour guider son peuple ? »

p. 180

L’histoire comme discipline est même convoquée comme n’ayant pas assez éclairé – si l’on excepte les travaux, anciens anciens maintenant, de Luc Perrin sur les réformes liturgiques dans le diocèse de Paris – les dérives des années 1960 :

« Les historiens ne se sont pas encore suffisamment penchés sur les ’excès’ que rapportent douloureusement ces catholiques pour qu’on puisse savoir précisément s’ils étaient aussi généralisés qu’ils le prétendent. Mais tel est bien le ressenti de ces croyants qui vont se laisser séduire par les fondateurs des communautés nouvelles… »

p. 71

Que dire alors des travaux, par exemple de l’historien Christian Sorrel, entre autres, sur différents diocèses, analysant concrètement et à base la réception de Vatican 2 – sans roman noir ni idéalisation ? Ici le récit mémoriel des années noires de l’après-concile est assimilé très rapidement pour expliquer l’essor vu comme irrémédiable des nouvelles communautés sans interroger d’autres facteurs : la permanence de forces plus classiques dans le catholicisme français dépassées par le renouveau des années 1960 et leur souci de reconquête ; le programme pastoral cohérent proposé depuis Rome pour limiter les potentialités du concile sous Jean-Paul II ; l’isolement progressif des courants dissidents, pas tant ceux politisés que ceux demandant une ré-organisation des ministères ordonnés, etc. Par des jeux subtils de glissement, l’argumentation suggère parfois que les secteurs plus ouverts du catholicisme seraient indirectement responsables de l’émergence de mouvements qui les ont pourtant combattus. Les nouvelles communautés ne sont pas que nées des déviances, réelles ou supposées, du Concile mais aussi parce des personnes le souhaitaient, y avaient un intérêt et voulaient maintenir un cadre traditionnel.

Les années 1960 peuvent ainsi servir de cause explicative commode qui permet d’éluder des filiations idéologiques plus anciennes. Alors que l’auteure montre très bien comment la théorie déviante de l’amour d’amitié de la famille Philippe s’inscrit dans le néo-thomisme français, elle n’insiste guère sur ses accents profondément réactionnaires. Ce courant théologique a pourtant été consciemment utilisé d’abord contre les idées « modernistes puis plus tard contre la »nouvelle théologie« représentée par Chenu et Congar et, enfin, après Vatican 2, contre les idées post-conciliaires… De même, les années post-conciliaires, associées à la remise en cause d’une ecclésiologie trop hiérarchique et la réhabilitation d’une Église »peuple de Dieu« , deviennent curieusement un moment où »on se tourne aussi avec fascination vers l’Inde et le modèle du gourou« (p. 180). Quitte à chercher des modèles étrangers, pourquoi pas alors et surtout celui du néo-pentecôtisme américain, évoqué pourtant en filigrane, avec ses excès émotionnels et son leadership qui repose sur le charisme auto-proclamé ? Le récit tend à voir dans le défaut d’autorité, notamment hiérarchique, la cause de l’après-concile qui fait tomber le sens de l’autorité : »Le climat post-conciliaire a également joué dans l’indulgence de la hiérarchie. L’Église tourne le dos à la sévérité de la fin de règne de Pie XII."

p. 224

Si la question mérite assurément d’être posée, faut-il alors regretter, d’un point de vue logique, les rigueurs du Saint-Office d’avant concile ? Hans Küng, Leonardo Boff ou autres apprécieront la façon dont le Saint-Siège a traité, dans un esprit peu fraternel et accommodant, leur situation dans les années 1970-1980. L’institution a su sabrer quand c’était possible… Cette façon de présenter les choses en position relativement indulgente avec une hiérarchie, présentée ou comme dépassée ou comme impuissante, tend symétriquement à discréditer certains lanceurs d’alerte des abus des nouvelles communautés, pourtant issus des secteurs plus ouverts du catholicisme français, comme la revue Golias guère épargnée :

« les rares à dénoncer les dérives de l’époque sont la revue Golias […] mais son ton anticlérical et ses enquêtes parfois à charge braquent des responsables d’Église et discréditent son propos dans une partie de l’opinion publique catholique. Avec, pour effet pervers, de décrédibiliser aux yeux de ceux-ci le message d’alerte des victimes qui n’avaient pas trouvé d’autre caisse de résonance à leur plainte. »

p. 216

Par un curieux renversement, les rares acteur médiatiques de l’époque, qui ont été lucides sur ce qu’il se produisait, sont présentés comme responsables du malheur de victimes dont ils auraient démonétisé la parole. Rappelons, sur ce point précis, que Christian Terras, le rédacteur en chef de Golias, a été très isolé et peu soutenu quand il s’est retrouvé assigné en justice pour diffamation en 2008 par les Béatitudes, avec Patrick de Carolis PDG de France 2, suite à un reportage diffusé à la télévision, à un moment où la vérité commençait difficilement à advenir. En 2007, les époux Michelena publient chez Golias un essai sur leur expérience aux Béatitudes qui reçoit très peu d’écho dans la presse religieuse. Est-ce cette même réserve qui pousse Céline Hoyeau à occulter la part également prise dans ces communautés dans les thérapies de conversion dont on commence tout juste à percevoir l’ampleur ?

Les médias plus traditionnels, et parmi lesquels on imagine les confessionnels, sont quant à eux salués pour « le rôle déterminant dans la révélation de ces abus » (p. 346) alors que, dans les années 1990 et 2000, ils ont un rôle encore limité et qu’il faudra bien un jour évaluer plus précisément leur responsabilité (surtout s’ils avaient eu connaissance d’informations qu’ils n’ont pas voulu révéler par peur du scandale). Si ces mêmes médias, reconnaît l’essayiste, ont pu participer au « phénomène de canonisation anticipée », notamment en publiant des « portraits hagiographiques » (idem), ils sont comme dédouanés par Céline Hoyeau par un goût du « people » propre au moment… Encore une fois, un élément exogène – les pratiques culturelles de l’époque – est employé pour amoindrir des causes qui sont peut-être beaucoup plus endogènes comme la politique généreuse de canonisation de Jean-Paul II des figures de fondateur qui aurait ouvert la voie à de telles adulations. Concernant ce pape, on se réfère, de manière assez attendue à vrai-dire, à la théorie selon laquelle « ignorant, il était mal conseillé » portée par un évêque émérite (dont on ignore l’identité) :

« On pourrait se demander si, comme pour les Légionnaires du Christ, ce n’était pas le cardinal Sodano, ancien secrétaire d’État du Vatican, ou Mgr Dziwisz, le secrétaire particulier de Jean-Paul II, qui intervenaient pour que les dossiers n’avancent pas. Le cardinal Dzimisz, comme le cardinal Rodé à la congrégation pour les religieux, avaient beaucoup de mal à croire des dénonciations qui s’attaquaient à des personnes semblant défendre le pape et la bonne doctrine ».

citation rapportée p. 252

Cette mise en récit, dont on ne reprend ici que quelques éléments, gagnerait donc à être nuancée en intégrant les mémoires qui n’appartiennent pas forcément à la culture religieuse de formation de l’autrice malgré son souci louable de se placer au-dessus de la mêlée.

***

Force est de constater, à la décharge de Céline Hoyeau, que la documentation de type historique fait encore défaut et c’est sûrement elle qui permettra de faire advenir progressivement un récit de qualité sur ces nouvelles communautés en les replaçant dans toutes les complexités de leur temps. Elle pourra ainsi l’associer aux nombreuses données auxquelles son travail journalistique lui a donné accès – et qui pour le coup sont très intéressantes.

Si les notices en ligne d’Étienne Fouilloux sur Thomas Philippe et Marie-Dominique Philippe pour le dictionnaire biographique des frères prêcheurs ont constitué, en 2019, les premiers travaux publics de qualité sur le système mystico-sexuel « Deheau-Philippe » (de même que le mémoire de master d’Antoine Mourges sur l’origine de l’Arche), on en apprendra encore plus avec les résultats de la commission dominicaine sur les frères Philippe. Cette dernière, composée de Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule et Sabine Rousseau, assistée d’un conseil scientifique d’une dizaine d’universitaires, apportera sûrement de nouveaux éléments de compréhension sur les dynamiques ayant conduit à la reproduction des mêmes logiques d’emprise et d’abus et, pourquoi pas, de leur diffusion au sein des nouvelles communautés.

Il n’en reste pas moins que l’ouvrage de Céline Hoyeau,, constitue un document, central en l’état des recherches existantes, sur le phénomène des « nouvelles communautés », et qui n’élude pas des questions qui, trop longtemps, ont été ignorées au sein du catholicisme français.

Vos réactions

  • Damien 10 septembre 2021 15:44

    La Nuit du chasseur (1955), unique film de Charles Laughton est un très beau film qui mérite d’être vu pour lui-même. Le frère dominicain Paul Adrien d’Hardemare lui a consacré deux vidéos intitulées : La nuit du chasseur : les abus dans l’Eglise. Ce rapprochement et son analyse de détail me semblent très pertinents. Voici les liens :

    • Le discours est étudié, l’exemple intéressant effectivement. Mais quand je l’entends maugréer sur le « réveil 30 ans après des victimes »…et que je le vois encensé sur certains sites intégristes, qu’il est finalement lui-même dans une posture très semblable au personnage qu’il dénonce, de par le registre et le type de médiatisation qu’il a choisie, j’ai comme une espèce de ressenti très mitigé sur ce clerc. Mon côté chat échaudé craint l’eau froide peut-être…

      • Tant mieux, Françoise, si vous ayez trouvé la vidéo intéressante.

        Cependant il ne parle pas du « réveil tardif 30 ans après des victimes ». Il parle de « ceux qui ont fermé les yeux sur les abus qui se réveillent trente ans après pour réclamer justice ».

        Comme certains évêques dont le zèle affiché aujourd’hui pour dénoncer les abus et les transmettre à la justice n’a d’égal que leur aveuglement, leur inaction ou leur dissimulation des faits pendant des années.

        • Quand je l’ai entendu dire ça, j’ai plus entendu un reproche voilé fait aux victimes qu’à ses collègues, Damien. D’autant plus que la réflexion est posée de façon impersonnelle.

          Les évêques zélés, ne se pressent pas au portillon… L’esprit de chapelle avec le silence épais et le déni qui vont avec est l’attitude qui domine au sein de l’institution cléricale romaine ; généralement sur ces dossiers, se sont les victimes qui font le boulot de dénonciation et de mise en lumière des abus et des crimes, pas le clergé, qu’il soit français ou étranger. Le clergé ne dénonce que quand il n’a plus le choix, qu’il y est acculé. Et c’est ça le plus lamentable. On est toujours dans le deux poids deux mesures : faites ce que je dis, pas ce que je fais. Et le plus drôle (humour noir) est que le clergé une fois les crimes dévoilés, relativise la gravité des abus et crimes et pense qu’une messe de contrition suffit pour les dédouaner de parfois 1 siècle d’abus, de crimes crapuleux et de violences avec des milliers voire des millions de victimes traumatisées à vie… Il y a une inconséquence manifeste et une approche particulièrement perverse et toxique, complètement déresponsabilisée, immature et méprisante. Qui parait d’ailleurs totalement surréaliste venant d’hommes se prétendant la crème de la crème de l’humanité. Attitude qui est attachée au fait que le clergé se pense et se construit toujours sur la croyance suivante : le clergé est tout-puissant et supérieur en tout par rapport au reste de la population. Ce qu’il fait est toujours bien et n’est jamais un crime car Dieu a sacré ces hommes comme prêtres. L’institution est le bataillon d’élites de Dieu. Donc tout ce que fait le prêtre par définition est bien.

          Cette fausse croyance qui va avec le cléricalisme, qui va avec cet ego surdimensionné collectif et parfois individuel, sous couvert d’une humilité à la tartuffe, est ce qui est en train de tuer l’institution. C’est suicidaire. C’est de l’autodestruction. Ce qui depuis les débuts, constitue le fonds de commerce de l’institution et sa principale attractivité (ce no-limit comportemental, ce no-limit d’oppression sur autrui et de domination au nom d’une auto-sacralisation -Dieu n’a rien à voir avec ça), est comme un gilet bardé d’explosifs.

          Est-ce que le clergé en est conscient ? Je ne le pense pas. Même pas ce jeune prêtre branché Youtube. Parce que s’il en était conscient, il aurait choisi un tout autre mode d’expression et d’analyse aussi. Compris que son exemple le place dans une situation identique au personnage qu’il dénonce. Et qu’il est lui-même dans ce paradoxe parce que faisant partie de l’institution.

          Il y a une réflexion spirituelle et intellectuelle je crois à mener sur le sujet qui dépasse de très loin cette espèce de racolage-replâtrage. On le voit déjà dans nombre d’exemples d’évêques, de prêtres qui dénoncent d’un côté mais soutiennent des trucs invraisemblables de l’autre… Arrêtons de tromper encore, de jouer ce jeu de dupes. Car là encore c’est une tentative de faire oublier crimes et abus et gravité de ces crimes et abus. Une posture-imposture de plus.

          Personnellement, je préfère largement l’approche d’un Patrick J. Wall sur le sujet à celle de ce prêtre qui se met en scène comme un pantin à la fois pour sa propre gloriole et pour redorer le blason institutionnel. Que le truc illusionne au début, c’est évident. Et le côté strass et paillettes a ses adeptes. Mais personnellement, la pilule passe très mal plus je vois le paradoxe du type et que j’enquête un peu sur qui il est et pourquoi il a fait ça. Et je crois qu’il ne mesure absolument pas que le personnage qu’il dénonce pourrait s’appliquer à lui-même aussi sous un autre aspect, sans parler d’abus et de crimes sexuels. Parce qu’il est dans une démarche égotique en réalité sous couvert de dénonciation. Pour son propre avancement institutionnel. Et ça devient lisible si l’on visionne d’autres vidéos.

          Donc, la forme et le fond relèvent plus pour moi d’une politique spectacle égotique que d’une réelle avancée et prise de conscience cléricale. Par contre, ça montre que le jeune clergé sait utiliser des techniques de communication et a été biberonné à ça. Donc on retrouve ce qu’on peut voir déjà depuis des années dans les vidéos des groupes dérivants sectaires du Renouveau Charismatique. Une mise en scène qui fait illusion sur le moment mais qui en réalité, est un enfumage de plus. Sous une forme différente.

  • Damien 6 août 2021 01:22

    Je signale ce livre du fr. Philippe Lefèbvre : Comment tuer Jésus ? Abus, violence et emprise dans la Bible aux éditions du Cerf (avril 2021). Je ne l’ai pas lu, mais je trouve sa perspective pour le moins intéressante. On peut en juger en feuilletant le début du livre sur Amazon. L’auteur n’a pas souhaité s’en tenir à une simple compilation de récits bibliques faisant écho à des situations dramatiques et douloureuses vécues dans l’Église. Je cite ce paragraphe qui me paraît refléter sa perspective réelle :

    « Ce livre n’est donc pas une illustration au moyen de quelques textes bibliques de cas d’emprises, de viols ou d’abus - perpétrés surtout dans l’Église -, comme s’il s’agissait de donner une sorte d’éclairage atypique, inattendu, presque ludique. Il s’agit ici d’une méditation biblique qui voudrait élucider théologiquement - par la théologie que la Bible développe - ce qui se passe quand des abus ont lieu, quand ils sont connus et pourtant tus, quand le silence s’installe, quand les victimes ne sont pas écoutées, sont interdites de parole, quand les personnes qui dénoncent ces agissements sont conspuées, agressées, réduites au silence, en un mot quand le grand drame de la Passion se met en marche, convoque d’innombrables acteurs et met en branle des processus séculaires d’omerta, d’intimidation et de combines internes. Les violences dans l’Église ne sont pas un à côté, douloureux mais minoritaire, d’une institution par ailleurs en pleine forme. Elles sont le visage de ce qui est représenté quand est accompli liturgiquement le sacrifice eucharistique : l’innocent bafoué, interdit de parole, assassiné, qui ressuscite et vient juger les vivants et les morts. »

  • Françoise 23 juin 2021 08:56

    Personnellement, je partage pleinement les réserves d’Anthony Favier. Si comme lui, je pense que ce livre est un début d’analyse et un bon résumé global des différentes dérives communautaire, il constitue aussi un masquage assez habile, comme une espèce d’excuse du système clérical catholique romain qui en réalité, a été et est toujours partenaire depuis P6/JP2 et a misé complètement sur ces communautés dérivantes sectaires pour détruire les avancées conciliaires et aussi pour faire perdurer le système institutionnel sur un pied matériel équivalent malgré une défection grandissante des vocations sacerdotales.

    La responsabilité vaticane de toutes ces mises en orbite est donc majeure à plus d’un titre :

    • L’institution profite financièrement (au moins en ce qui concerne les hauts-clercs) et idéologiquement de ces communautés pour tenter de se maintenir à flots au plan politique, diplomatique, financier, vocationnel. Peu lui chaut qu’il y ait des dérives criminelles du moment que les affaires continuent.
    • Cette orientation a été décidée sciemment par JP2 et son équipe pour en finir avec le Concile Vatican 2 et réimposer un catholicisme totalitaire à l’ancienne, évacuant les avancées démocratiques laïques dans la gestion pastorale, synodale de l’Action Catholique. En s’appuyant sur des structures qui font en partie illusion tout en étant sûre que le résultat et le fonctionnement restent identitaires et ultraconservateur.
    • L’institution (hauts-clercs là encore et pas que réactionnaires) a accepté la corruption des gourous de ces sectes et le secret du St Office pour masquer crimes et délits. (l’exemple de Maciel payant des voitures de luxe à certains cardinaux est assez emblématique).
    • L’institution a confié de plus en plus de responsabilités y compris au sein du Vatican à différentes communautés dérivantes sectaires et d’abord pour tout ce qui concerne l’IOR, sa banque. Et utilise régulièrement les services des différentes communautés, en surplus de la milice opusienne et de différentes mafias.

    Aujourd’hui ces sectes ont tellement de poids au plan institutionnel et financier qu’il est totalement impossible à l’institution ni de les juger, ni de s’en passer. Il est donc totalement vain d’espérer une quelconque réforme institutionnelle. Mais toujours plus d’emprise de ces sectes au sein de l’institution.

    Il y a effectivement une haute trahison des gourous et de l’institution vis à vis des croyants, mais y a-t-il réellement trahison des gourous d’avec l’institution ? Non, car il y a eu une volonté politique de les imposer à la population des croyants à des fins de contrôle, de domination et de rétablissement autoritaire également. Et l’entente a été relayée par nombre d’intermédiaires.

    Au final, gourous comme institution devraient pouvoir répondre au pénal de leur entente à des fins de contrôle, de domination et d’exploitation également des croyants engagés dans ces communautés dérivantes sectaires.

    Mais est-ce que les victimes seraient prêtes à cela ? Non. Pas toutes. Et c’est bien sur cette peur d’engager la responsabilité pénale institutionnelle que jouent à la fois ces sectes et l’institution depuis toujours. En comptant sur la révérence de beaucoup au système institutionnel, même si exploités jusqu’au trognon par sectes et institution. En s’aidant aussi de ce livre qui charge uniquement les sectes en terme de responsabilité, mais défend l’institution comme si elle était ignorante de tout ça.

    Est-ce étonnant ? Non. Car n’oublions pas que le livre est produit par l’institution elle-même, puisque édité par la Croix, donc par les Assomptionnistes qui font partie de l’institution. C’est un peu comme si Céline Hoyeau travaillait pour les éditions du Vatican. Avant que l’institution reconnaisse sa part de responsabilité, les poules auront des dents.

    Regardez comment l’institution essaie de s’en tirer avec des messes de repentance vis à vis de tortures, d’exploitation et de traites durant plus d’un siècle dans les couvents-prisons ? Ce type de comportement devrait éclairer je pense, la façon dont procède toujours l’institution face à ses responsabilités lourdes et pénales.

    Est-ce que d’autres travaux universitaires feront date et poids ? Certainement pour nous laïcs. Mais l’institution en fera simplement boulette de papier avant de jeter le tout à la poubelle pour continuer sur le même régime, sans aucune remise en cause ni en question.

    Jésus crie mais la caravane passe, pourrait être le slogan institutionnel.

    C’est pourquoi je le crains, tant qu’il n’y aura pas un jugement pénal international, rien ne changera. Ni pour ces sectes, ni pour l’institution. Le comportement criminel et dérivant sectaire ne fera qu’augmenter. Le nombre de victimes aussi. Les livres de témoignages se tasseront puisqu’ils ne serviront à rien vu la permanence criminelle et sectaire.

    Et le même mouvement se poursuivra jusqu’à l’implosion complète du système institutionnel. Ramené à une simple association de malfaiteurs et d’escrocs patentés. Et de secte. Car où se trouve le message christique dans de tels comportements ? Nulle part.

    • Sans doute Françoise, mais quelle est l’importance à plus long terme ? La seule et véritable question qui se pose nous dépasse tous : l’avenir du catholicisme, du moins en Europe ( mais l’Europe est fondamentale). Quand je dis tous, c’est tous : criminels, victimes, responsables, chrétiens- catholiques. On peut raisonnablement escompter que dans vingt ans la plupart des lieux de foi et de pratique auront fermé par manque de « personnels » ou de croyants. Ce qui nous sidère aujourd’hui, et à juste titre nous scandalise, se posera en d’autres termes pour les générations futures, les premières, dans les temps post-modernes, à être confrontées à un « désert catholique » ( comme on parle de désert médical). La parole des victimes est d’une telle profondeur et d’une telle importance qu’elle devrait inviter tout croyant catholique à se poser la seule question qui vaille : comment vivre l’évangile vraiment. L’a-t-on d’ailleurs vécu un jour dans l’Histoire ? Cela passe aujourd’hui, de toute évidence, par une prise de conscience très approfondie des désastres générés par toutes ces communautés déviantes, un travail de fond sur l’aveuglement et l’inaction gravissimes des uns et des auttres, ce à quoi s’applique la CIASE. Son rapport sera une étape essentielle pour la réflexion de tous. Le cinéma, avec Les éblouis ou Grâce à Dieu, les documentaires comme « celui d’Arte » y contribuent. Ce site aussi. Le grand mérite de Céline Hoyeau est de participer à sa manière et de la place où elle est. Son livre a un caractère pédagogique dans l’organisation de l’information et se met à portée d’un large public. Car soit on dénonce au rique de lasser, soit on éclaire dans le but de faire réfléchir les plus réticents. Le second parti me paraît plus utile, voilà pourquoi le livre de Céline Hoyeau est aussi précieux. Le speudonyme « Anne » s’est affiché lors de mon premier message. Je suis Anne Thoraval, je le précise car une internaute use du pseudonyme « Anne » sur ce site. Voilà pourquoi je fais cette précision.

      • La foi n’est pas une question institutionnelle ni religieuse, Anne. Elle est une question personnelle et existentielle. La foi est émancipation de l’individu par le partage, l’affection, l’entraide, pas contrôle ni domination. Donc que l’institution cesse d’exister ou redevienne une secte, ne devrait pas poser souci aux croyants. Hormis si eux croient à un système institutionnel, c’est à dire à un contrôle et à un système de domination hiérarchisé. Le message de Jésus à l’heure où nous écrivons peut se vivre tout à fait hors religion, hors système. Il se vit depuis un moment, j’allais écrire depuis toujours ainsi. Il s’incarne même souvent mieux hors système qu’à l’intérieur. Alors hauts les cœurs ! Et travaillons plutôt au traitement pénal de tous ces abuseurs, manipulateurs et criminels.

        Dernier truc, la foi n’est pas transmissible. C’est quelque chose qui se travaille en soi, qui se découvre dans une rencontre personnelle. Ca dépend pas d’une leçon, c’est quelque chose qui relève de l’âme donc aussi de l’intuition. Un mot qui fait généralement très peur à tous les fervents adeptes de la domination et du pouvoir quel qu’il soit d’ailleurs. Jésus est là tous les jours jusqu’à la fin des temps. Nous ne sommes pas et ne serons jamais orphelins. Comprendre qu’il est toujours à nos côtés pour tout, jusqu’à la fin du voyage terrestre, c’est ça la foi. Reconnaître son pas, écouter comme Samuel le faisait si bien. Voir, repérer les signes, se faire confiance…C’est ça la foi. Ca ne dépend pas d’un clergé. Je le dis pour le catholicisme comme je pourrais le dire pour l’islam, le judaïsme, l’hindouisme, etc, etc.

        Le bouquin de Céline est une révérence au système. Avec un peu de dénonciation. Mais c’est le changement dans la continuité. Continuons surtout de révérer le système clérical, de lui accorder l’ignorance, l’irresponsabilité. Ben oui, c’est sur la bêtise et la peur et la révérence qu’a toujours fonctionné le système clérical, comme tous les pouvoirs totalitaires d’ailleurs. C’est mon côté anar qui parle, certainement, mais la réalité, c’est ça. Est-ce que c’est tenable au plan du droit fondamental humain de s’asseoir ainsi sur la responsabilité criminelle partagée de l’institution et de ces sectes ? Moi je dis non. Et ça doit appeler un traitement judiciaire pénal international. Y a que comme ça qu’on fera cesser ces horreurs. Mais si les gens veulent continuer à bien se faire laminer, ben continuons comme ça. C’est tellement plus simple, plus facile. Seulement après, faut pas venir pleurer, parce que là, ça marchera plus. On ne peut pas dénoncer juste médiatiquement sans qu’il y ait un aboutissement judiciaire. Sinon, ça fait rire les oiseaux, et le pouvoir totalitaire rigole aussi. Sous cape, mais il rigole. Il va vous faire un petit salamalec et des larmes de crocodile pour dire qu’il comprend, compatit et puis il continuera. Parce que c’est tellement jouissif pour ces gens-là d’humilier, d’exploiter, de violer, de contraindre, d’abuser. C’est misérable, affreux, mais c’est leur fonctionnement. Et ça, d’un point de vue juridique, ce n’est juste pas acceptable. Dans une société de droit où le respect, la liberté, l’égalité, la fraternité sont des valeurs essentielles, ce n’est pas acceptable. Donc ça doit être jugé au pénal.

        • Je ne reviens pas sur le fait que des cours pénales jugent ces criminels, la question ne se pose même pas. Que le droit canonique fasse la place aux victimes dans ses procédures est d’une nécessité absolue aussi et je suis convaincue que l’Histoire y obligera. Pourt le reste, Françoise, ce sont de très grandes questions. Pour moi, si , la foi se transmet dans ses contenus, pas dans son expérience vitale et décisive, qui est affaire de l’intime et du singulier, et de la grâce de Dieu. Mais une expérience sans contenus peut-elle être celle d’une foi en connaissance de celui auquel elle croit ?

          Ce « celui », Jésus, bien sûr, qu’on le veuille ou non, a été transmis. On croit ce que disent de Lui les apôtres dans les Evangiles. On croit en sa Résurrection par la parole de ses apôtres. On prend connaissance de Jésus aussi par ceux qui ont écrit sur lui, leur expérience ( les « saints »).

          La perception, la réception que l’on a de la personne de Jésus n’est certes pas la même qu’au début du christianisme, mais dans la définition essentielle, c’est-à-dire dogmatique ( le mot est lâché) cela demeure même, et c’est le Credo. Adhérer au Credo, qui est l’ensemble complet de la foi catholique, provient d’un processus de connaissances, de débats théologiques inscrits dans l’Histoire ( je mets exprès un grand H). Ce que désigne la parole des victimes s’inscrit dans cette Histoire avec un grand H, mais elle désigne une gravité très particulière car il y a crime et crime aussi contre l’âme. On ne fait pas plus grave.

          Cette parole renvoie aux contenus de la foi et pas à sa seule expérience intime, sinon il n’ y aurait pas crise majeure. Elle renvoie à une faute gravissime contre la transmission de la foi, à une défiguration complète du visage même de Jésus. Le « désert catholique » serait un désert de connaissances des contenus de la foi et compliquerait cruellement son expérience intime. L’Eglise ce n’est pas seulement un clergé, une Rome fautive, un Vatican en-dessous de tout, ou de catholiques qui préfèrent ne rien voir, c’est aussi un ensemble de pensées, de mystiques, de textes au fond. Une histoire d’humanités diverses. C’est la grandeur, et le risque inoui ,du christianisme de s’appuyer et de se vivre dans la liberté donnée par la connaissance autant que par l’expérience.

          C’est de la responsabilité de l’institution aussi que de faire connaître et faire accéder à ces œuvres de l’esprit et de la foi. Or, dans ces communautés sectaires que les hiérarchies ont, oui, laissé prospérer dramatiquement, l’organisation de l’ignorance est majeure. C’est à dire l’organisation d’une foi fausse, idolâtre, aberrante dans ses contenus, car placée hors transmission, et du coup hors liberté. Car transmettre, c’est recevoir, c’est à dire écouter, penser, cheminer lentement, péniblement jour après jour. Jésus parle, chemine ; on l’écoute, on le suit, d’un coup pour les uns, avec plus d’hésitation pour d’autres. On reçoit : « Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? » Cette capacité de transmission, avec les sacrements, pour moi c’est cela, essentiellement, l’Eglise. Et je pense que sans cette Eglise, la foi comme expérience n’est pas possible.

          • Bonjour Anne

            Je pense contrairement à vous que la foi peut se vivre complètement et de façon harmonieuse hors de l’Eglise. Ce n’est pas la foi que l’Eglise transmet. C’est un conditionnement dogmatique et doctrinal avec rituels. Ce qui n’est pas du tout la même chose. La foi relève d’une rencontre personnelle et intime, très intérieure, très intuitive, sensible, pas de dogmes ni de doctrine ni de rituels. Et c’est bien toute la différence qui existe entre foi et religion. Dans la foi, le conditionnement n’existe pas. Le dogme, la doctrine, le rituel non plus. Ca n’a aucune place. Parce que la foi ne procède d’aucun système de domination ni de contrôle. Elle procède d’une liberté intérieure, d’une harmonie, d’un élan aussi ainsi qu’une conscience éveillée progressivement et par étape au plan spirituel. Sans compétition, sans élitisme, sans idée de profit quelconque. Des aspects qui n’ont strictement rien à voir avec une logique d’appareil telle que la partition jouée par l’institution religieuse cléricale depuis le 4e siècle.

            L’Eglise a transmis une histoire de Jésus. Ce qui s’appelle du matériel culturel. L’Eglise protestante réformée (précision utile pour dissocier l’église réformée des sectes protestantes), transmet elle aussi cette même histoire. L’Eglise arménienne pareil. L’Eglise orthodoxe à quelques détails près idem. Mais c’est du bagage culturel. Un élément de compréhension de Dieu, de l’Histoire de Jésus et de son message. Hélas, ce que les gens retiennent ne sont pas les évangiles mais les dogmes, la doctrine. Qui en fait est le vrai bagage de transmission de l’Eglise. Dogmes, rituels, doctrine. Ca c’est le fonds de commerce et c’est sur ces dogmes, rituels et doctrine et non pas sur le message christique que s’appuie l’institution pour juger, déterminer, évaluer les croyants.

            Or le cœur de foi c’est le rapport personnel à Dieu qui s’opère dans la prière, la méditation, le rapport aux autres, le respect de soi aussi. Sauf qu’à la place, que nous donnent ces religions ? Des dogmes, une doctrine, des rituels. Qui en fait servent à quoi ? A faire écran entre Dieu et nous et surtout à conditionner les individus dans certains comportements de soumission à un clergé comme seul intermédiaire et guide spirituel. Voire à remplacer Dieu par le clergé.

            Or, qui mieux que nous, peut guider notre vie spirituelle ? Qui mieux que Dieu et nous, peuvent faire avancer la spiritualité pour nous-même ? Toutes les religions qui utilisent des dogmes, des rites et des doctrines pour conditionner les populations, les utilisent pour opprimer les individus. Pas pour les émanciper ni leur permettre d’accéder à une vie épanouie, heureuse au plan spirituel et personnel. Même pas pour leur permettre d’accéder à une compréhension sans jugement d’eux-mêmes et encore moins des autres. Ni même de la parole christique. A moins de faire des études théologiques, mais qui ne concernent pas la majorité des croyants.

            Que nous dit Jésus ? De nous aimer. Mais on ne peut pas aimer si l’on ne démarre pas par s’accepter soi, se connaître soi. Pour, une fois tous les conflits, les peurs, les complexes traités, nous puissions enfin aimer véritablement les autres et vivre vraiment une harmonie existentielle, relationnelle et spirituelle. Ca veut dire passer du temps pour développer sa conscience dans ses différents aspects. S’éveiller spirituellement. Ca veut dire apprendre à respecter ses besoins, ses désirs profonds, se comprendre dans sa complexité et ses paradoxes qu’on va retrouver chez les autres, aller explorer aussi le formatage familial et religieux et comprendre pourquoi d’une génération à l’autre, il y a certains comportements répétitifs et d’autres qui relèvent de l’évitement. Comment se positionner de façon plus libre. A quoi ça fait référence, comment on sort de certaines dépendances, comment on libère des non-dits, des peurs transmises, des dénis. Comment Dieu fait sens dans notre vie quotidienne.Ca veut dire sortir du cadre, inventer son propre rapport au monde différent du conditionnement familial, religieux et social. Et être au final dans un alignement entre le rapport à Dieu de pleine confiance, le rapport à soi et le rapport aux autres.

            Or c’est pas ça du tout qu’enseignent les clergés et les religions. Ce qui relève de l’enseignement religieux peu importe la religion d’ailleurs, est une conduite de honte, de séparation d’avec les autres (genre ils puent du bec s’ils ne sont pas baptisés), c’est une conduite de soumission à toute forme d’autorité. Surtout pas de rébellion, surtout pas de remise en cause ni en question de la doctrine ni des rites. Surtout pas de considération de soi mais au contraire un mépris de soi, le plus vif possible, des mortifications pour parfaire l’auto-humiliation appelée humilité. Hors du clergé point de salut. Honte sur les femmes qui sont par définition impures. Glorification masculine et cléricale. Il est où le rapport avec Jésus ?????Où se situe le rapport à son message d’amour universel ???? Nulle part. Mais à force de répéter Jésus partout et de lire les évangiles qui n’ont aucun rapport avec les dogmes cléricaux soit dit en passant mais auquel malignement le clergé les associe, les populations ont perdu le fond du message christique et ne s’attardent plus à vivre la foi directement à travers un lien personnel à Dieu mais par le truchement du clergé sacralisé et divinisé. Le rapport direct à Dieu, il est rendu suspect, douteux.

            Et c’est dans cette défiance à soi, au rapport personnel à Dieu, à ce cléricalisme et ce fanatisme clérical que se fonde le creuset de tous les crimes et dérives et tous les génocides aussi, toutes les formes d’exploitation. Et là vous continuez à me dire qu’il faut préserver ce creuset criminel ????Quand je lis ce que vous écrivez, j’ai l’impression d’un contresens. Surtout de la part de personnes qui ont souffert par rapport à ces dérives sectaires et religieuses. Qui ont subi des crimes, des abus, des maltraitances.

            Mais qui remettent le couvert, confortent le creuset de leur douleur, de leurs traumatismes les plus profonds. Il y a quelque chose qui m’échappe dans ce type de comportement. J’ai vraiment l’impression d’une confusion entre foi et religion. A moins que vous soyez uniquement dans une foi cléricale. Vous ne croyez pas en Dieu mais vous avez besoin viscéralement d’un système autoritaire de gouvernance religieuse. Ce qui n’a rien à voir avec Dieu, ni avec une quelconque spiritualité. C’est juste un conditionnement matériel qui vous rassure. Comme si Dieu ne pouvait exister qu’au travers d’un clergé.

            Je ne me l’explique que de cette façon.

            Pour moi, nous avons aujourd’hui tous, justement parce que nous avons souffert de façon intense par les crimes et errances cléricaux, la chance de pouvoir vivre une vie spirituelle authentique et dégagée de toute forme d’adhésion religieuse. Et enfin dans un lien personnel à Dieu seul, de trouver paix et harmonie et sens dans nos vies. Bref de devenir des adultes dans la foi et non plus d’éternels immatures.

            Et parvenir enfin à un équilibre intérieur profond. Comprendre enfin que Dieu ce n’est pas le clergé, que ce n’est pas de la doctrine, que ce n’est pas des rituels (qui relèvent davantage du paganisme). Que c’est une rencontre, que c’est une confiance profonde en Dieu, une contemplation aussi des merveilles toutes simples quotidiennes que nous avons sous les yeux (humains, animaux, plantes) et un partage tous ensemble de nos dons et qualités respectives pour bâtir ensemble et sans exclusion, une société fraternelle et plus libre et égalitaire. Sans idée ni de pouvoir ni de domination ni de hiérarchie ni d’élitisme ou je ne sais quoi de ce genre. Dieu est là partout et avec vous tous les jours. Vous n’avez pas besoin de convoquer un clergé pour l’avoir à vos côtés. Ni de faire je ne sais combien de rituels. Ni de suivre une doctrine ni des dogmes. Le message christique est tout simple autant qu’exigeant : aimer. Y a pas plus universel que ça. Et pour paraphraser la Carmen de Bizet, l’amour est enfant de bohème, il n’a jamais connu de lois. Jésus le savait depuis toujours. Il nous l’a dit. Mais certains se sont dit : « on va dire qu’on serait les seuls à dire qui c’est qu’est bien, pas bien, à exterminer. Et qui c’est qui mérite Dieu. Le reste, un dégagé. »

            Et le plus lamentable dans l’histoire, c’est que des gens ont cru que Dieu était comme ces hommes imbus d’eux-mêmes. Alors que non. Dieu nous aime tous et toutes jusqu’à la moindre fibre de notre âme et de notre corps. Peu importe qui nous sommes. Alors comment voulez-vous qu’Il puisse cautionner des humains qui décident entre eux qui a le droit de vivre, et qui doit mourir ??? C’est un contresens complet en matière de compréhension de Dieu. Et de l’Amour Infini divin.

            A partir de là, vous comprenez bien l’errance que constitue l’établissement religieux au plan spirituel. J’allais dire le détournement de Dieu qu’on opéré les religions. A des fins matérielles essentiellement. Parce que c’est pas la sainte pauvreté prêchée qui domine, surtout chez les hauts-clercs. Avec leur train de vie, on en nourrirait des pauvres, on en ferait faire des études à des tas d’enfants pauvres de touts pays…

            Comment donc peut-on réclamer le maintien d’un pouvoir temporel criminel qui n’a cessé d’opprimer les humains et d’en exterminer beaucoup (guerres de religions) afin d’en tirer profits et privilèges financiers et statutaires ?

            J’avoue…je ne comprends pas. Encore moins de la part de victimes du système. Et ne venez pas me dire que c’est pour tendre l’autre joue. Parce que je ne vous croirai pas. Cela s’apparenterait plus probablement à une dépendance en lien avec une certaine immaturité. Car comment expliquer que des personnes aussi maltraitées par la religion continuent de plébisciter un système totalitaire qui les a humiliés, bafoués, torturés, traumatisés ? Vous remarquerez que Jésus est resté tout au long de sa vie, dans une critique certaine du judaïsme et de son clergé (et de la religion en général). Et qu’il n’a à aucun moment, et encore moins sur la croix, vanté les mérites de la religion. De la foi, oui. Du rapport personnel à Dieu, oui. Et à de nombreuses reprises. Mais pas des religions. Et ce n’est même pas lui qui pardonne. Il demande à Dieu Père de pardonner. Lui ne pardonne pas. Il demande à Dieu de le faire à sa place parce que ce serait un non-sens de pardonner des personnes qui le tuent sans motif de condamnation. Lui ne peut pas, mais Dieu Père peut. Car Il se trouve en état de le faire. Pas Jésus.

            Voyez, tout ça, il faut le réaliser. Et ce n’est surtout pas le discours clérical. Et pourtant, c’est le discours christique. Mais les religions (systèmes cléricaux institutionnels) pour maintenir l’emprise sur les croyants, utilisent Jésus sur la croix pour les absoudre de tous leurs crimes. Et ça c’est misérable. Ca n’a rien de saint ni de juste au plan moral ni au plan spirituel. C’est juste de la manipulation. Pour pouvoir continuer d’opprimer, de dominer, de violenter sans être jamais inquiété ni au pénal, ni au civil et encore moins au plan canonique.

            Je vous laisse réfléchir à tout ça. J’ai bien conscience que je soulève des questions brûlantes et polémiques aussi. Mais qui, au jour d’aujourd’hui se posent. Parce que nous sommes un certain nombre de croyants, comprenant bien la forfaiture. Qu’il faut pour grandir spirituellement et vivre la foi de façon heureuse, sortir des systèmes religieux qui trahissent Dieu, qui violentent et détruisent les croyants. Car ceux qui y restent, sont violentés, abusés, manipulés, fanatisés. Et finissent soit par violenter, manipuler, fanatiser les autres ou s’autodétruire. Résultat plutôt dramatique et contradictoire avec l’idée d’amour universel divin et de profit spirituel. Donc revenons à l’essentiel : le rapport personnel à Dieu. Qui ne fait de mal à personne. Qui éclaire notre route. Qui n’a pas besoin de fanatiser ni de convertir qui que ce soit puisque de toute façon Dieu sait se manifester à nous quand Il pense que nous sommes en capacité de nous ouvrir spirituellement. Donc quand Il le fait, c’est pour de bonnes raisons. Et Il sait très bien nous guider tout seul comme un grand. Il n’a pas besoin de qui que ce soit pour le faire. Parle, Seigneur, ton serviteur écoute. C’est tout simple…Il y a des outils bibliques, des livres divers de spiritualité peu importe la culture. Chacun puise où il se sent appelé. Fait sa tambouille et voit ce qui la ou le fait avancer spirituellement. Et Dieu pourvoie au reste. L’essentiel est d’être bien dans sa foi, épanoui, heureux. De se sentir aimé, d’aimer aussi. C’est ça une vie spirituelle réussie et une vie intime et relationnelle réussie aussi.

            Rien à voir avec de grandes doctrines, théories, des rites à n’en plus finir. Pas besoin d’auto-flagellation, de mutilations, d’humiliations, de privations, de pénitences… Vous avez suffisamment d’aléas dans une existence à supporter pour ne pas vous en rajouter en plus. Et en tant que femme, quand vous savez par quoi nous pouvons passer comme douleurs multiples et variées jusqu’à la vieillesse, honnêtement, nous avons notre dose de souffrance et d’épreuves, sans même parler de nos contextes existentiels. Et Dieu n’est surtout pas là ni pour nous accabler ni pour en rajouter. C’est pas le genre de la maison. Sinon, ce serait un être sadique et pervers. Ce qu’Il n’est surtout pas.

      • D’accord avec vous Anne Thoraval sur le grand mérite pédagogique du livre de Céline Hoyeau. En effet, si ses explications peuvent être critiquées, ( bien qu’expliquer ne soit ni justifier ni accuser), il n’en demeure pas moins que ce livre ajoute des éléments indispensables à la nécessaire prise de conscience du catho de base. Il l’éclaire sur des faits incontestables, pour la plupart inconnus de lui. Cette prise de conscience, qui nécessite un deuil très douloureux d’illusions presque vitales, ne peut se faire que lentement et par étapes pour beaucoup des croyants. Il revient et reviendra ensuite aux historiens d’expliquer plus finement et plus précisément les causes de cette crise de l’Eglise dont succès et chutes des communautés nouvelles ( et de leurs gourous ) ne sont qu’un des symptômes, bien sûr le plus scandaleux pour les cathos de base et le plus douloureux pour les victimes.

  • Anne 17 juin 2021 00:02

    Je viens d’achever la lecture de La trahison des pères, qui a le grand mérite de présenter un récit global des abus commis au sein des communautés nouvelles.

    Si je comprends les réserves d’Anthony Favier, je les trouves pourtant peu justifiées par l’intention de l’auteur. Son livre ouvre la voie, insiste sur la nécessité des recherches, des publications à venir ( le rapport de la CIASE, très attendu). Le dernier chapitre, Généalogie d’un abus, qui reprend des recherches sur L’eau vive et l’oncle des frères Philippe, est vraiment très intéressant et démontre que seule l’élucidation rigoureuse du rôle des acteurs et de leurs enjeux aboutit aux vraies questions : la gnose, le narcissisme, un code canonique inadapté…

    Loin de tourner vers le passé, de revenir sur Vatican II ou sur Mai 1968 ( qui n’est d’ailleurs pas considéré comme événement moteur dans La Trahison des pères), Céline Hoyeau pose des questions de fond et ne cache pas son scepticisme quant à la possibilité de réformation réelle des communautés mises en cause. Ce n’est pas si fréquent.

    J’ajoute qu’en quatre ans Thomas Philippe a été -secrètement- condamné et écarté de L’Eau Vive. Cela laisse songeur quand on voit qu’il a fallu vingt ou trente ans pour que des décisions soient prises contre des fondateurs ou communautés sectaires.

    Un livre vraiement utile et éclairant, avec ses limites sans doute mais qui comptent peu puisqu’il n’ y a pas de volonté polémique, et qui a l’immense mérite de mettre à la portée du plus grand nombre des informations précises, sourcées, datées, de les rassembler et de présenter un constat.

    • Je suis tout à fait d’accord avec Anne. M. Favier passe un peu à côté et des intentions de Céline Hoyeau et de la réalité de ces fondateurs dont elle parle dans son livre. Ceux et celles qui sont passés par leurs communautés savent qu’on y tenait savamment un double discours : de grande ouverture et « modernité », pour se démarquer de communautés jugées trop rigides ou anciennes ou « has been » (comme disent les jeunes), de grande fidélité au magistère pour se démarquer de communautés jugées trop en marge de l’Eglise et donc loin du Pape et donc pas très rassurantes. Ces communautés ont su se tenir en dehors des oppositions progressistes/réactionnaires. Elles voulaient se situer « ailleurs ». C’était du pur marketing, très bien pensé, d’ailleurs. Il y avait de tout, même politiquement parlant… Cela pouvait aller chercher à gauche, au centre, à droite…

      • Anne, Fabio,

        Tout a fait d’accord avec vos commentaires. Céline Hoyeau explique pourquoi ces communautés nouvelles ont pu apparaître comme le Renouveau de l’Eglise après les secousses de Vatican II et de Mai 68. Elle ne le justifie en aucun cas.

        Ces communautés ont su effectivement présenter un double discours et un double visage ; une apparence de « modernité « propre à séduire les jeunes et les générations après concile et une grande fidélité au pape et au Magistère propres à séduire les générations plus âgées, plus conservatrices ainsi que les autorités ecclésiales confrontées par ailleurs à l’effondrement des vocations religieuses et sacerdotales. Dans le vide laissé par les crises post conciliaire et post 68, elles ont su en effet jouer savamment le rôle d » d’attrape tout « , y compris du point de vue politique. Il n’est peut être pas étonnant que la plupart des communautés étudiées soient nées dans un pays comme la France de très ancienne chrétienté en même temps que très largement sécularisé.

        Il n’en est pas de même des nouveaux mouvements ecclésiaux ( Légionnaires du Christ, Opus dei, Focolari etc…), ouvertement plus conservateurs dans leurs formes de piete et leurs options politiques, nées ailleurs qu’en France dans d’autres circonstances historiques ( avant Vatican II ) et la ou prevalait la lutte contre le communisme. D’où leur peu de succès en France ainsi que leur appui sans failles de la part de Jean Paul II.

        Le livre de Céline Hoyeau est aussi très précieux en ce qu’il met à jour les liens, souvent inconnus, entre tous ces fondateurs déviants.

Revenir en haut