Pétition pour la réhabilitation de Pierre Vignon dans ses fonctions de juge ecclésiastique

Samedi 3 novembre 2018

Au lendemain de la réquisition du parquet d’Orléans d’un an de prison ferme à l’encontre de l’évêque André Fort pour des faits de non dénonciation d’agression sexuelle sur mineur, à la veille de l’Assemblée Plénière des évêques de France à Lourdes, censée accueillir pour la 1re fois la parole des victimes après plusieurs décennies d’omerta systématique, les 12 évêques de la Région Auvergne Rhône-Alpes ont courageusement destitué le père Pierre Vignon de ses fonctions de juge ecclésiastique, pour avoir, seul parmi ses pairs, demandé publiquement la démission de son archevêque, qui avait couvert et laissé dans leurs fonctions des prêtres auteurs de faits pédocriminels.

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Voici une nouvelle preuve de l’absence d’intention bienveillante de cette hiérarchie pour combattre efficacement cette pédocriminalité qui détruit l’Église. Ce cléricalisme assumé met un homme de courage, de liberté de conscience et de responsabilité individuelle dans un isolement total, le prive de continuer à agir auprès des victimes, et ce dans l’indifférence générale de tous les évêques.

Pense-t-on ainsi, par cette mise au trou d’un homme, protéger l’institution et esquiver la remise en question fondamentale à laquelle l’Église n’a pas d’autre choix que de se soumettre ?

Selon les termes du porte-parole et secrétaire de la Conférence des Évêques de France, Olivier Ribadeau Dumas, « l’Église a failli », une nouvelle fois encore. Nous voulons lui répondre que cette faillite n’est nullement une fatalité et que les paroles d’évangile, qui appellent constamment à une remise en question individuelle dans un devoir de conscience quant aux fautes propres, n’exclut pas les hiérarques de ce devoir pour leur charge. Il est encore temps, par un acte simple, de réparer l’erreur honteuse ici commise.

Faudrait-il donc prouver la nécessité de liberté de parole, inscrite pourtant dans le droit canonique, envers la hiérarchie ? Voudrait-elle empêcher toute remise en cause pourtant salutaire à sa survie ?

Voici qu’ils peuvent être jugés sur leur seul rapport autosuffisant, produit, dans la satisfaction d’eux-mêmes, il y a 72 heures, sur l’état des abus sexuels dans l’Église en France. Inutile de préciser que dans le cadre de son recensement de victimes, la CEF s’est économisée en s’abstenant de contact avec l’association de victimes qui dit publiquement depuis 2 ans recueillir des témoignages par centaines…

Les longues colonnes de « N.C. » (Non collecté) font froid dans le dos…

On n’en est pas encore à l’effort de transparence et de vérité initié récemment en Allemagne par exemple. La formule d’introduction (page 3) apparait comme un sinistre copié-collé (avec les dates changées quand même …) des précédentes assemblées où chacune clamait qu’enfin la prise de conscience était bien réelle et les outils en place …

Nous sommes remontés jusqu’au bulletin de secrétariat de la CEF n°10 de juillet 1998(!) après l’intervention du Docteur Marie Jo Thiel sur la question de la pédophilie : « Il importe aujourd’hui de prendre la mesure de ce problème qui s’avère crucifiant tant dans son abord, son diagnostic que dans son suivi. »

Ou encore ce discours de clôture de Mgr Billé, président à l’assemblée de la CEF de Novembre 2000 : « Nous avons parlé de la pédophilie et de toutes les questions que pose à l’Eglise et à nous mêmes ce difficile problème lorsque les adultes en cause sont des prêtres. Nous avons travaillé et réfléchi avec sérieux, dans une vraie confiance mutuelle, aidés par une préparation rigoureuse et conscients de la gravité des enjeux. Il me semble que nous sommes désormais mieux armés pour le discernement que nous avons à faire…. Les évêques mesurent combien la blessure des enfants est profonde et souvent même indicible. Ils en éprouvent une vraie souffrance ; ils sont solidaires des victimes et de leurs familles. »

« Dans l’Église de France, ce tabou (de la pédophilie dans l’Église) est tombé il y a dix ans, lorsque la CEF s’est saisie de la question à Lourdes, en novembre 2000. C’est là que j’ai compris que ce n’était pas un péché comme les autres, que ces actes laissaient ensuite un dégout de soi, une blessure incroyablement intime et durable. » Ces mots, c’est le Cardinal Barbarin qui les écrivait le 3 mai 2010…

Auront-ils maintenant le courage de dépasser cette façade respectable et effarouchée qui n’est qu’hypocrisie ? La CEF a insisté sur la liberté de parole qui sera laissée aux victimes lors de cette assemblée plénière. 1h30 de travail pour des décennies d’omerta…

Comment ne pas voir un nuage noir, dans un ciel annoncé si bleu, dans la sanction qui a frappé le Père Pierre Vignon ?

Limoger Pierre Vignon, c’est limoger le 1er clerc qui a osé affirmer publiquement l’évidence qu’un archevêque qui a couvert, déplacé et promu à multiples reprises des hommes qu’il savait pédophiles, et qui, pour le cas Desperon, a commis des agressions postérieurement à sa connaissance des faits, ne peut décemment rester dans cette fonction d’orateur.

Limoger Pierre Vignon, c’est limoger l’homme qui aura combattu durant 10 années de sa vie pour faire reconnaître les droits des victimes de Thierry de Roucy, fondateur de Points Cœur, renvoyé de l’état clérical, s’opposant notamment à l’association de soutien de Thierry de Roucy « Compassion et Vérité », dénonçant une série de manipulations malhonnêtes et un lynchage orchestré. A ce jour, le Vatican n’a toujours pas pris les mesures pour supprimer l’œuvre Points-Cœur car elle est soutenue par le cardinal controversé du Chili, Mgr Errazuriz et l’évêque néo-conservateur de Toulon, Mgr Rey.

Limoger Pierre Vignon, c’est limoger l’homme qui soutient et défend depuis plus de dix ans les laïcs, prêtres, religieux et religieuses victimes d’abus de pouvoir qui souvent ne trouvent qu’en lui un recours. Sans avoir pu régler toutes les questions, tant les situations sont souvent délicates, il leur a assuré une écoute et une proximité qui leur a permis de ne pas se décourager face au mutisme habituel du clergé et de la hiérarchie quand il y a un problème. C’est aussi limoger un homme qui a accueilli les confidences de nombreuses victimes d’abus sexuels commises dans l’Église, tant au sujet des affaires de pédocriminalité que des questions d’abus sexuels sur des femmes consacrées.

Enfin, limoger Pierre Vignon, c’est limoger un homme qui a soutenu dès sa création La Parole Libérée, ce qui lui a valu le reproche de son évêque d’être considéré comme leur aumônier..

Si cette hiérarchie catholique porte et portera le destin de l’Église et les conséquences de son absence de détermination, nous, citoyens, ne pouvons rester silencieux face à une telle intimidation. La liberté d’expression fait partie des grandes valeurs de notre république et aucune élite ou supérieur hiérarchique ne peut remettre en cause ce droit et ce devoir fondamental qui symbolise la hauteur de notre humanité.

Nous en appelons une nouvelle fois à nos fidèles soutiens, en vue de la réhabilitation dans ses fonctions, d’un homme qui aura marqué l’histoire de l’Eglise de France par son courage, sa liberté de parole et un investissement constant et infaillible pour lutter contre les abus perpétrés au sein de l’Église Romaine.

Aymeri Suarez Pazos (pdt AVREF)

François Devaux (pdt La parole libérée)

Voir en ligne : https://www.change.org/p/l-eglise-d…

Vos réactions

  • Françoise 6 novembre 2018 16:18

    Revenant de congés, je n’ai pas eu d’info à ce sujet. Si Charles Morerod a proposé ça à Pierre Vignon, c’est touchant et vraiment fraternel.

  • Sébastien 5 novembre 2018 10:02

    Pierre Vignon a été destitué de son poste de juge ecclésiastique mais n’a pas été suspendu dans ses charges paroissiales. Ceci étant, j’ai lu quelque part que deux évêques, un français et un suisse (Mgr Morerod, je suppose) lui auraient fait savoir qu’ils pouvaient l’accueillir dans leurs diocèses respectifs. Quelqu’un aurait plus d’info à ce sujet ?

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