Spotlight : la réaction parfaite d’un évêque suisse

Dimanche 20 mars 2016

Sur le site du diocèse de Lausanne-Genève-Fribourg, on peut lire le billet de l’évêque auxiliaire, Mgr Alain de Raemy, à propos du film Spotlight. C’est comme cela qu’il fallait réagir : pas de justifications, pas de minimisation, pas de tentatives pour détourner l’attention sur d’autres institutions. Juste un peu d’humilité, et d’amour pour son prochain. Ses paroles sont celles d’un vrai pasteur. Elles m’ont fait du bien.

« Spotlight », ou l’évangile vécu par les autres…

Si vous n’avez pas vu ce film, Oscar 2016 du meilleur film et du meilleur réalisateur, alors que vous vous dites catholique, vous devez y aller ! Car vous serez éprouvé, littéralement mis à l’épreuve, dans votre foi, pour votre foi.

C’est une histoire vraie, terriblement vraie. Et vous rendrez grâce à Dieu, au prix de votre honte, pour l’œuvre de vérité d’un journalisme acharné, œuvre de journalistes si vrais qu’ils vont payer, eux, de leur foi personnelle, leur conscience professionnelle. Une foi perdue, non pas par la faute du monde, mais par la faute de l’Eglise, de 250 prêtres abuseurs et d’au moins un évêque « protecteur ». Et cela à Boston, « la très catholique », il y a à peine 15 ans. Comme ailleurs, comme chez nous.

Un des journalistes qui mène l’enquête, qui entend les victimes et « leurs prêtres », finit par confier à sa collègue : J’avais la foi enfant. Je m’en suis éloigné adulte. Je pensais la retrouver en vieillissant…, mais maintenant je l’ai perdue, définitivement. Et à sa collègue, elle qui accompagnait encore chaque dimanche sa grand-mère à l’église, de répondre : oui, en moi aussi, quelque chose est cassé, anéanti, fini.

C’est alors sans joie aucune, mais avec la bonne conscience du devoir évangéliquement accompli, que leur enquête triomphera d’une omerta institutionnelle qui protégeait tout et tous, à une seule exception près : les victimes. Jamais l’hypocrisie pharisienne n’aura été aussi évidente, après Jésus, et chez les siens.

Que penser, que dire, que faire ? D’abord regarder la réalité en face. Pleurer avec les victimes. Parler avec ceux qui parlent. Dénoncer. Corriger. En toute vérité. Et se confronter encore et encore à l’évangile. Et pas seulement en matière sexuelle. Car toute déviance est une honte. Et en blesse plus d’une et plus d’un. Restons donc en carême. En vrai carême. En carême de conversion.

Pour que l’évangile ne soit pas vécu seulement par les autres…

Que Pâques nous soit Résurrection !

+ Alain de Raemy

Source : http://www.diocese-lgf.ch/accueil.html

Voir en ligne : http://www.diocese-lgf.ch/accueil.html

Vos réactions

  • Françoise 21 mars 2016 10:42

    L’Eglise de Suisse semble depuis quelques années, avoir engagé un vrai travail de prise de conscience sur le sujet. C’est le deuxième évêque après Charles Morerod qui s’exprime en des termes aussi vrais. Il a fallu les combats plusieurs décennies durant de Louisette Buchard Molteni, ceux de Jean-Louis Claude, Clément Wieilly et tant d’autres, les écrits de Pierre Avanzzino pour que le clergé suisse affronte la réalité de ses crimes. Le fait que la confédération via Simonetta Sommaruga ait également engagé un début de travail sur ces questions avec réparation financière (même si ça lambine, comme le précise Clément Wieilly), accès aux archives pour les victimes, excuses publiques, a sans doute aussi joué un rôle conséquent dans cette prise de conscience. Nous sommes loin de ces paroles de vérité en France et de ces démarches de réparation. Pourtant, il y a des victimes en France, constituées en différentes associations. Mais tant l’état que l’épiscopat, les congrégations et institutions impliquées, que les médias ont des problèmes pour parler de ces situations. Espérons que l’affaire Preynat aidera à faire entendre la voix de toutes les victimes françaises.

    Un petit lien sur le combat pour l’aide financière aux victimes suisses, avec une initiative musicale :

    https://www.cath.ch/newsf/clement-wieilly-fribourgeois-veut-faire-bouger-choses-faveur-de-lenfance-volee/

    Et la première chanson du cd d’aide aux victimes :

    http://www.enfant-oublie.ch/

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