Les évêques mexicains demandent à la Légion du Christ d’indemniser des victimes

Dimanche 15 décembre 2019

L’association américaine ReGAIN (une association fondée par d’anciens membres de la Légion du Christ) vient de publier sur son site internet un article qui récapitule l’affaire du père Fernando Martínez. Vous trouverez ci-dessous la traduction de cet article en français.

ReGAIN exprime sa perplexité devant la dernière lettre d’excuses que la Légion du Christ a envoyée à Ana Lucía Salazar et à d’autres femmes, abusées sexuellement à l’âge de 8 ans dans une école de la Légion du Christ, l’Institut Cumbres de Cancun, entre 1991 et 1992.

Profitant de sa renommée dans les médias mexicains, Analú a rompu son silence il y a quelques mois et a fait du grabuge dans les médias, ce qui est hélas la seule façon d’attirer l’attention des dirigeants de la Légion du Christ. Elle et ses parents avaient contacté les supérieurs de la Légion peu de temps après les agressions, il y a près de vingt ans. A l’époque, ces derniers n’avaient pas été coopératifs et leur avaient menti. L’agresseur (qui avait déjà perpétré des agressions sexuelles à Mexico avant d’être débarqué par les autorités locales et RÉASSIGNÉ à Cancun) a ensuite été envoyé au noviciat de la Légion à Salamanque, en Espagne. À l’heure actuelle, il est toujours protégé par la Légion dans son quartier général de Rome.

Depuis les premières accusations d’Ana Lucía, certaines de ses anciennes camarades qui ont également subi des agressions sexuelles de la même personne, à la même époque et au même endroit, se sont manifestées pour la soutenir et apporter leur propre témoignage dans l’affaire contre le père Fernando Martínez, LC. Deux de ces jeunes femmes ont même décidé récemment de témoigner à visage découvert dans les médias. Incapable d’endiguer le flot de preuves accablantes qui s’accumulent, la Légion a fait plusieurs déclarations publiques ; la Direction, en la personne du Supérieur Général, le P. Eduardo Robles Gil, LC, a publié des communiqués de presse, écrit une lettre personnelle d’explications, d’excuses et de promesses à l’égard des victimes. Il semblerait que l’agresseur ait également écrit à Ana Lucia pour reconnaître n’avoir pas su « contrôler ses pulsions » lesquelles l’ont conduit à commettre autrefois des « actes impurs » et dont « il se souvient chaque jour avec beaucoup de regret et pour lesquels il lui demande pardon. »

ReGAIN doit mettre en garde le père Robles Gil et Mme Salazar concernant les larmes de crocodile des pédophiles, qui ne peuvent s’empêcher de minimiser les faits, de trouver des excuses et d’essayer se faire passer pour des victimes innocentes.

Mais, comme d’habitude, il n’est pas fait mention de sanctions (hormis peut-être quelques « prières et pénitences », comme dans le cas du père Marcial Maciel) ni la moindre mention d’une indemnisation des victimes et de leurs familles.

En novembre 2019, le journal mexicain PROGRESO a publié un article qui commençait ainsi :

« ROME - Les légionnaires du Christ ont reconnu aujourd’hui, 50 ans après la première plainte, que le père Fernando Martínez avait abusé de plusieurs enfants dans les centres éducatifs de la congrégation au Mexique, selon l’enquête commandée en mai dernier après les révélations publiques de l’une des victimes, la chanteuse et animatrice de radio Ana Lucía Salazar.

Après une enquête qui a duré six mois et qui a été menée par l’agence spécialisée Praesidium, les Légionnaires ont fait savoir, dans une note, que le prêtre controversé avait fait l’objet de diverses plaintes entre 1969 et 1993, par d’anciens légionnaires, par des proches ou par des familles d’enfants âgés de 4 à 11 ans, dans différentes écoles du pays : les Instituts Cumbres de Mexico et de Cancun.

Dans cette dernière école, par exemple, Martínez a abusé entre 1991 et 1993 « d’au moins six filles âgées de 6 à 11 ans ». « Praesidium a corroboré ces abus par des documents et de multiples témoignages. […] Le père Martínez, interrogé par Praesidium lors de l’enquête interne, reconnaît avec tristesse et remords les abus « contre ces mineurs », lit-on dans l’un des paragraphes du long communiqué.

C’était « une très grave erreur d’assigner ce prêtre qui avait déjà commis des agressions sexuelles à un travail pastoral avec des enfants et des jeunes », ajoutent-ils dans un autre paragraphe.

Quoi qu’il en soit, à ce jour, Martinez continuerait à exercer ses fonctions de prêtre en attendant qu’une procédure canonique le dépouille de ses vêtements sacerdotaux, comme le suggère la note. Le supérieur général de la Légion, Eduardo Robles-Gil, a remis les résultats de l’enquête le 11 novembre 2019 à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi et attend « des instructions sur la procédure canonique à suivre ».

Par conséquent, pour le moment, les seules sanctions infligées à Martinez sont de ne pas pouvoir exercer son ministère de prêtre de façon publique, ainsi que quelques autres restrictions, comme le fait de ne plus avoir le droit de porter la soutane et de ne pas avoir le droit d’entrer contact avec des mineurs, comme l’ont expliqué les Légionnaires du Christ, qui n’ont pas non précisé si cette affaire allait être portée devant la justice mexicaine.

Comme le lecteur peut le voir, la Légion présente les informations à son propre avantage, avec des termes soigneusement choisis et souvent ambivalents. Le fond du problème, c’est, comme nous l’avons mentionné ci-dessus, qu’il y avait de graves accusations contre le père Martinez depuis 1969. Les pauvres supérieurs de la Légion du Christ prétendent qu’ils ne savent pas quoi faire et qu’ils attendent les instructions de leurs supérieurs… Pourtant, le Vatican, les évêques américains et les évêques mexicains se sont déjà exprimé clairement sur le sujet.

La Légion est une institution tellement spéciale que ceux qui la dirigent ont besoin d’être informés directement par le Vatican, voire par le pape en personne, pour savoir ce qu’ils doivent faire… Les règles qui s’appliquent aux prêtres diocésains ordinaires et autres religieux ne s’appliquent-elles pas à eux ? Ah oui, c’est vrai : les Légionnaires sont « l’espérance de l’Église » et les « amis du Pape »…

LES FAITS :

En 1969, de graves accusations sont portées contre le père Martinez alors que celui-ci travaille avec des enfants à l’Institut Cumbres de Mexico.

Les supérieurs de la Légion (à l’époque, le père Maciel était probablement impliqué) ont décidé d’amadouer les parents et de RÉASSIGNER l’agresseur à un nouveau poste.

Aucun suivi psychologique pour l’agresseur.

Jusqu’à preuve du contraire : aucune indemnisation des victimes.

L’agresseur se rend alors à Cancun, pour une mission similaire (école primaire, confesseur)… et récidive. Ses supérieurs, le père Eloy Bedia et Mgr Jorge Bernal Vargas (l’évêque local, qui est également membre de la Légion du Christ), probablement après avoir consulté le père Maciel, EXFILTRENT l’agresseur vers un lieu sécurisé où il jouit d’une parfaite impunité : le noviciat de Salamanque, en Espagne… pour y superviser de très jeunes séminaristes.

Lorsque le dernier scandale éclate, les supérieurs de la Légion (la nouvelle génération de supérieurs soi-disant « réformés ») envoient Martinez à Rome, où celui-ci est hors de portée des autorités et où il continue d’exercer son ministère sacerdotal.

Mme Salazar rencontre le nonce apostolique au Mexique pour lui expliquer sa situation. Elle, ainsi qu’un ancien légionnaire qui la soutenait, sont sidérés lorsque le nonce du Vatican (peut-être sur le ton de la plaisanterie) commente l’agression en citant Nietzsche : « Pour certains hommes, les relations sexuelles avec des enfants sont le plus grand des plaisirs. »

Cet échange n’a guère contribué à rapprocher Ana Lucía de l’église catholique.

En revanche, la hiérarchie mexicaine s’est montrée plus sympathique et solidaire, en publiant un document qui appelle les dirigeants de la Légion du Christ à être plus engagé dans le soutien aux victimes et qui promet de porter l’affaire devant la Conférence épiscopale mexicaine.

https://www.religiondigital.org/sursum_corda_el_blog_de_guillermo_gazanini/Obispos-Mexico-exigen-reparacion-sexuales_7_2185051479.html

Les évêques mexicains demandent une réparation pour les dommages causés par les agressions sexuelles

Dans un récent courrier, le secrétaire général de la Conférence Episcopale Mexicaine (CEM) et coordinateur général du Conseil National pour la Protection des Mineurs demande que l’agresseur sexuel appartenant à la Congrégation fondée par le père Marcial Maciel soit démis de sa condition cléricale.

10.12.2019 | Conférence Episcopale Mexicaine Toujours du côté des victimes Mexico, le 10 décembre 2019 Prot. 147/19

Engagés dans la protection des enfants et des adolescents, dans nos églises mexicaines, le Conseil National pour la Protection des Mineurs (CNPM) de la Conférence Episcopale Mexicaine désire s’exprimer au sujet de certains aspects du rapport d’enquête de la Congrégation des Légionnaires du Christ du 22 novembre 2019, concernant les cas d’agressions sexuelles commises par le père Fernando Martínez, LC et la conférence de presse tenue par certaines victimes le 26 novembre 2019 :

1. Tout d’abord, nous désirons saluer le courage des victimes et nous encourageons leur quête de justice ainsi que le travail des associations qui les accompagnent dans ce travail ; Nous demandons à Dieu de les éclairer et nous réitérons notre engagement à leur service.

2. Dans le rapport susmentionné, nous n’avons trouvé aucune mention d’actes concrets de justice et de réparation à l’égard des victimes. De même, le rapport ne permet pas de savoir qui, du côté de la congrégation, portera la responsabilité de faire toute la lumière sur ceux qui ont étouffé l’affaire.

3. Dans le domaine canonique, l’enquête précédente a été menée avant un procès pénal canonique, en attendant les décisions que prendra la Congrégation pour la Doctrine de la Foi.

4. Dans le domaine du droit civil, étant donné que la Congrégation religieuse a informé que la dénonciation des faits avait déjà été présentée devant les autorités compétentes, nous avons offert aux victimes le soutien et les conseils pour leur permettre de procéder de la manière la plus appropriée. Nous demandons aux autorités judiciaires d’identifier chaque responsabilités correspondantes, tant par action que par omission.

5. En ce sens, les victimes ont été invitées, non seulement à porter plainte au pénal, mais aussi à réclamer une compensation pour les actions ou les omissions commises par les dirigeants de la Congrégation des Légionnaires du Christ.

6. Nous prions instamment le Directeur Général de demander au Saint-Père, pro bono Ecclesiae, de renvoyer le père Fernando Martínez de l’état clérical et, au nom de l’obéissance religieuse, d’assigner ce dernier à résidence au Mexique, afin que celui-ci soit mis à la disposition des autorités compétentes.

Enfin, nous exprimons notre ferme engagement que dans cette affaire, comme dans toutes les affaires d’agression sexuelle de mineurs dans l’Eglise, une attention prioritaire sera accordée aux victimes, que les agresseurs seront dénoncés au pénal, que les dommages causés seront réparés, que tous les responsables feront face à la justice devant les autorités civiles et canoniques et agiront avec célérité et responsabilité. Ce n’est qu’ainsi que se réalisera ce qui est affirmé dans le Psaume 84 : « Amour et vérité se rencontrent ; Justice et paix s’embrassent. "

+ Alfonso G. Miranda Guardiola Évêque auxiliaire de Monterrey, Secrétaire général de la CEM Coordinateur Général du Conseil National

Source : www.regainnetwork.org

Voir en ligne : https://regainnetwork.org/2019/12/1…

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