LES DOMINICAINS : les crimes systémiques de l’Eglise Catholique continuent… : Poster un message

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Ne pas banaliser est plus que nécessaire, c’est indispensable et pas qu’au sujet de ce qu’on nomme pudiquement « abus sexuels »

Le jeudi 14 décembre 2023

Bonjour,

Je ne peux que souscrire à ce que vous développez dans ce post. Comment vous donner tort, alors même que, dans la communauté Saint-Jean, que je connais bien, les exemples ont jusqu’à date assez récente, abondé d’abus en tout genre. C’est une cousine des Dominicains, dont j’ai, en ce qui concerne ces derniers, globalement une perception positive - vous l’avez bien compris. Quant à Saint-Jean, j’y ai vécu quelques années, à un moment où un jeune individu pose normalement les bases de son existence. Les miennes ont volé en éclat et je ne dois qu’à quelques proches d’être encore en vie pour vous répondre, et rien n’est acquis pour moi encore aujourd’hui. Cela étant dit, j’ai également pu observer chez un membre de la communauté dominicaine des comportements susceptibles de reproches, quant à sa compréhension de l’exercice de l’autorité (je ne parle pas ici du Père Marie-Do ni même de son frère, que j’ai connu aussi). Qu’aurions-nous dit des carmélites à l’époque de Thérèse de Lisieux ? Il y a, comme cela, des siècles maudits. Les XVIIe et XIXe, à mes yeux, en font partie. Je m’autorise ces références historiques, puisque vous avez pris la liberté d’évoquer « L’Etat du monde », un texte médiéval en effet remarquable de lucidité. Beaucoup de problèmes viennent du fait que, parfois, et même trop souvent, les dépositaires de l’autorité, dans les religions notamment (pas seulement le christianisme romain, donc), se laissent aller à un mépris des droits humains et de la prudence la plus élémentaire au motif que leur autorité s’enracine dans des textes inspirés ou dictés par une source incontestable. La reconnaissance impérative de la dignité humaine est alors relativisée à tel point qu’elle est maltraitée, voir niée, au nom d’une obéissance verticale qui endosse une autorité divine dans le quotidien bien relatif de chaque homme. Il faut donc baliser ce qui relève des besoins et des droits humains fondamentaux, à respecter absolument, et discerner avec soin ce qui contrarie ou renie ces derniers au nom d’un principe plus élevé. De toute manière, comme l’a écrit saint Irénée de Lyon dans son traité « Contre les hérésies » à la fin du IIe siècle : « La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant, et la vie de l’homme, c’est la vision de Dieu ». Comme la vision de Dieu, sous forme non voilée, c’est pour plus tard, la première proposition reste vraie, même s’il convient de tenir les deux propositions dans une même exégèse. Il reste à toute institution religieuse chrétienne de ne jamais oublier ceci : « qui veut faire l’ange, fait la bête » (Pascal, Pensées) ou bien encore, « là où il y a de l’homme, il y a de l’hommerie » (saint François de Sales, je ne sais plus où). Le destin des communautés dites « nouvelles » - surtout elles - nous le rappelle avec effroi. La prise en compte des faiblesses humaines et, de manière générale, de la simple réalité individuelle, devrait dissuader d’accorder à des hommes les pouvoirs exorbitants que l’on associe trop souvent à une autorité fondée sur un inaccessible absolu. C’est le rôle, mais aussi la chance, d’une communauté bien réglée, pour reprendre l’un de vos termes, que j’aime bien. Pour avoir parfois fait de la loyauté (loyauté à tout et à n’importe quoi, pourvu que l’autorité « légitime » soit obéie) une condition sine qua non du bien et de l’union à Dieu, des vies ont été martyrisées. Ce n’est d’ailleurs pas propre à l’environnement religieux, comme vous le soulignez très justement vous-même. J’aurais ainsi beaucoup à dire en ce qui concerne la « loyauté » dans la fonction publique, l’Education nationale par exemple qui, à défaut de respecter ses enseignants autant qu’il le faudrait, se protège au moyen de cette argutie juridique et morale : la loyauté. C’est, pour aller plus loin, le problème de l’extension même de l’obéissance : jusqu’où doit aller mon obéissance ? Dois-je par exemple, au nom d’une prétendue solidarité nationale, prendre un traitement en phase d’expérimentation, en abolissant tout jugement personnel, seulement par « loyauté » citoyenne ? J’ai quelques idées sur le sujet. J’aurais beaucoup à vous raconter, moi aussi, pour m’en tenir au seul aspect religieux, mais dans le florilège des horreurs entendues en communauté, celle-ci, à mes yeux, détient la palme : « celui qui ordonne peut se tromper, mais celui qui obéit ne peut pas se tromper en obéissant ». On n’est pas loin de l’obéissance du « perinde ac cadaver », qui traverse la littérature spirituelle chrétienne depuis les Pères de l’Eglise en passant par des extrémistes comme François d’Assise. De toute façon, c’est l’ensemble de l’Eglise qui a été « monachisée » dès l’Antiquité tardive et surtout à partir du Moyen Âge classique et çà ne me semble pas tout à fait juste. Nous vivons encore de cette vision non seulement méliorative, mais absolutiste. Encore avons-nous la chance de nous référer à des textes considérés comme « inspirés », non pas « dictés », comme d’autres dont on voit bien qu’ils sont par voie de conséquence encore moins bien armés contre le fondamentalisme, voire le terrorisme. Que de pathologies derrière tout cela ! Merci à vous pour ce dialogue qui, en tout cas, montre à travers vos exemples et les miens qu’une approche réaliste et indulgente, mais également juste et réglée du monde, doit prévaloir en matière de vie religieuse, comme dans la vie professionnelle, morale, sociale et politique. Bien à vous. Pierre.

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